Ergebnis für URL: http://www.ummisco.ird.fr/perso/bacaer/2009BMB2.htmlLes modèles matriciels périodiques de populations : taux de croissance, reproductivité
et entropie
Bull. Math. Biol. 71 (2009) p. 1781-1792
Nicolas Bacaër
Institut de recherche pour le développement, Bondy, France
nicolas.bacaer@ird.fr
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Résumé
Cet article considère trois aspects différents des modèles matriciels périodiques
de populations. Premièrement, on obtient une formule pour l'analyse de
sensibilité du taux de croissance l qui est plus simple que celle trouvée par
Caswell et Trevisan. Deuxièmement, on généralise la formule pour la
reproductivité \(\mathcal{R}_0\) dans un environnement constant au cas d'un
environnement périodique. On généralise aussi des inégalités entre l
et \(\mathcal{R}_0\) prouvées par Cushing et Zhou. Troisièmement, on fait
quelques remarques sur la notion d'entropie d'évolution H, introduite par
Demetrius, et son lien avec le taux de croissance l dans le cas périodique.
1. Introduction
Il y a environ un siècle, Lotka a étudié un modèle démographique en temps
continu, linéaire et structuré par l'âge, dans lequel la population tend à
croître exponentiellement. Le taux de croissance est r. Plusieurs auteurs, parmi
lesquels Leslie, ont étudié dans les années 1940 un modèle en temps discret
analogue au modèle de Lotka, \[p(t+1)=A\, p(t)\] avec une matrice A positive et
primitive. Si l est le rayon spectral de A, la population tend à croître
exponentiellement comme \(\lambda^t\). Hamilton a étudié dans les années 1960 la
sensibilité de r par rapport à de petits changements des taux de fertilité et de
mortalité à chaque âge (Hamilton, 1966). Demetrius (1969), Goodman (1971),
Caswell (1978) et d'autres ont étudié dans le modèle en temps discret la
sensibilité de l : \begin{equation}\tag{1} \frac{\partial \lambda}{\partial
A_{i,j}}=\frac{\ell_i\, r_j}{\langle \ell,r\rangle}\, . \end{equation}
\(\ell\) est un vecteur propre à gauche, \(\ell\, A=\lambda\, \ell\,\), et r un
vecteur propre à droite, \(A\, r=\lambda\, r\), de \(A\) associé à la valeur
propre l. \(\langle\cdot,\cdot\rangle\) désigne le produit scalaire usuel de
vecteurs réels.
Dans les années 1960, Skellam (1967) a commencé à étudier les modèles
matriciels périodiques \[p(t+1)=A(t)\, p(t)\] avec \(A(t+m)=A(t)\). Cette
généralisation est nécessaire car de nombreuses espèces d'animaux et de plantes
ont des taux de fertilité et de mortalité qui sont très influencés par les
saisons. À un facteur périodique près, les populations tendent toujours à croître
exponentiellement, comme \(\lambda^t\). \(\Lambda=\lambda^m\) est le rayon
spectral de la matrice \[A(m-1)\cdots A(1)\, A(0).\] Dans les années 1990,
Caswell et Trevisan (1994) ont étudié la sensibilité de L. Ils ont prouvé
l'égalité matricielle \begin{equation}\tag{2} \left (\frac{\partial
\Lambda}{\partial A_{i,j}(t)}\right) = \bigl (A(t-1) \cdots A(0)\, A(m-1) \cdots
A(t+1)\bigr )' \left (\frac{v_i(t)\, w_j(t)}{\langle v(t),w(t)\rangle}\right ) .
\end{equation} \('\) désigne la transposition de matrices. \(v(t)\) est un
vecteur propre à gauche et \(w(t)\) un vecteur propre à droite de
\begin{equation}\tag{3} A^*(t)=A(t-1) \cdots A(t-m) = A(t-1)\cdots A(0)\, A(m-1)
\cdots A(t) \end{equation} associé à la valeur propre L. Lesnoff et coll. (2003)
ont prouvé une formule légèrement différente: \begin{equation}\tag{4} \left
(\frac{\partial \Lambda}{\partial A_{i,j}(t)}\right) = \bigl (A(m-1) \cdots
A(t+1)\bigr )' \left (\frac{v_i(0)\, w_j(0)}{\langle v(0),w(0)\rangle}\right )
\bigl ( A(t-1) \cdots A(0)\bigr )' . \end{equation} La formule (2), qui se trouve
dans la seconde édition du livre de Caswell (2001, p. 358), est particulièrement
utilisée par les biologistes de terrain. Elle a été utilisée pour de nombreuses
populations : des souris (Grear et Burns, 2007), des hermines (Wittmer et coll.,
2007), des hiboux (Gervais et coll., 2006), des faucons et des mouettes (Hunter
et Caswell, 2005), des palourdes (Ripley et Caswell, 2006), des pissenlits
(Vavrek, 1997), des herbes diverses (Mertens et coll., 2002 ; Davis et coll.,
2004), des chênes (Alfonso-Corrado et coll., 2007), des impatientes du Cap
(Steets et coll., 2007), des mélampyres des prés (Ramula, 2008), etc. Le premier
objectif de notre article est de signaler une formule de sensibilité plus simple
pour l (et \(\Lambda=\lambda^m\)). En effet, Gourley et Lawrence (1977) ont déjà
remarqué que l était le rayon spectral de la matrice C, avec
\begin{equation}\tag{5} C=\left (\begin{array}{ccccc} 0 & 0 &\cdots & 0 & A(m-1)
\\ A(0) & 0 &\cdots &0 & 0\\ 0 & A(1) &\ddots &0 & 0\\ \vdots &\ddots & \ddots &
\ddots & \vdots\\ 0 & 0 &\cdots & A(m-2) & 0 \end{array}\right). \end{equation}
On supposera toujours que la matrice C est irréductible. Considérons comme dans
(Brommer et coll., 2000) un vecteur propre à gauche
\[L=(\ell(0),\ldots,\ell(m-1))\] et un vecteur propre à droite
\[R=(r(0),\ldots,r(m-1))\] de C associé à la valeur propre l. On étend la
définition de \(\ell(t)\) et \(r(t)\) pour que
\(\ell(t+m)=\ell(t)\) et \(r(t+m)=r(t)\). On montre dans la section 2 que
\begin{equation}\tag{6} \frac{\partial \lambda}{\partial A_{i,j}(t)} =
\frac{\ell_i(t+1)\ r_j(t)}{ m \, \langle\ell(0),r(0)\rangle}\ . \end{equation}
Contrairement à (2) et (4), l'interprétation de (6) est une simple généralisation
de celle donnée habituellement pour (1) (Caswell, 2001). \(A_{i,j}(t)\) est le
nombre de « descendants » de type i au temps t+1 engendrés par un individu de
type j au temps t. La sensibilité de l par rapport à \(A_{i,j}(t)\) est
proportionnelle à la population stable de type j au temps t, \(r_j(t)\,\), et à
la valeur reproductive du type i au temps t+1, \(\ell_i(t+1)\). Des analogues de
(6) pour des modèles périodiques en temps continu structurés par âge se trouvent
dans (Bacaër et Abdurahman, 2008, équations (10)-(11)) mais elles s'obtiennent
aussi par un passage à la limite avec (6).
Le taux de croissance n'est pas le seul paramètre intéressant. En
épidémiologie, on accorde beaucoup d'attention à la reproductivité. En biologie
de l'évolution, l'entropie d'évolution, qui diffère du taux de croissance mais
lui est relié de près, jouerait un rôle important (Demetrius, 1974 ; Arnold et
coll., 1994 ; Demetrius et coll., 2004 ; Demetrius et Ziehe, 2007 ; Demetrius et
coll., 2009). Une question naturelle est d'adapter ces deux paramètres au cas
périodique. C'est l'objet des sections 3 et 4. On explique ou rappelle seulement
comment ils se calculent. On ne cherche pas à obtenir de formule explicite pour
leur sensibilité par rapport aux paramètres. En pratique, les analyses de
sensibilité peuvent se faire numériquement;. Mais cela n'est guère explicatif.
Dans la section 3, on présente une définition et une formule pratique pour la
reproductivité dans les modèles matriciels de populations avec coefficients
périodiques de la forme \begin{equation}\tag{7} p(t+1)=A(t)\, p(t),\quad
A(t)=F(t)+T(t). \end{equation} \(F(t)\) modélise la reproduction
et \(T(t)\) décrit les transitions. On suppose
* \(F(t+m)=F(t)\), \(T(t+m)=T(t)\)\(\quad \forall t\)
* \(F_{i,j}(t)\geq 0\), \(T_{i,j}(t)\geq 0\)
* \(\sum_{i} T_{i,j}(t)\leq 1\)
* le rayon spectral de la matrice carrée \(T(m-1)\, T(m-2)\cdots T(0)\) est
strictement inférieur à 1: la population s'éteint s'il n'y a pas de
reproduction.
Avec ces hypothèses, on montre que \(\mathcal{R}_0\) est le rayon spectral de la
matrice \begin{equation}\tag{8} \left (\begin{array}{cccc} F(0) & 0 &\cdots & 0\\
0 & F(1) & \ddots & \vdots\\ \vdots & \ddots & \ddots & 0\\ 0 & \cdots & 0 &
F(m-1)\end{array} \right) \left (\begin{array}{ccccc} -T(0) & I & 0 & \cdots &
0\\ 0 & -T(1) & I & \ddots & \vdots\\ \vdots & \ddots & \ddots & \ddots & 0\\ 0 &
&\ddots &\ddots & I\\ I & 0 & \cdots & 0 & -T(m-1)\end{array} \right)^{-1}.
\end{equation} \(I\) désigne la matrice identité de taille adaptée. Si de plus
la matrice C donnée par (5) est irréductible, alors \begin{equation}\tag{9}
\mathcal{R}_0\geq 1 \Rightarrow 1\leq \lambda \leq \mathcal{R}_0\, ,\quad 0 <
\mathcal{R}_0\leq 1 \Rightarrow \mathcal{R}_0\leq \lambda \leq 1. \end{equation}
La formule (8) et les inégalités (9) généralisent des résultats obtenus pour un
environnement constant (\(m=1\)); \(\mathcal{R}_0\) est alors le rayon spectral
de \(F\, (I-T)^{-1}\) (Cushing et Zhou, 1994 ; Cushing, 1998 ; Li et Schneider,
2002). Ce dernier résultat est déjà la généralisation de la formule de Leslie
(dans les modèles matriciels structurés par âge) aux modèles matriciels
structurés en types. Pour d'autres travaux sur \(\mathcal{R}_0\) dans les
modèles périodiques en temps continu, voir (Bacaër et Guernaoui, 2006 ; Bacaër,
2007 ; Bacaer et Ouifki, 2007 ; Wang et Zhao, 2008).
Dans la section 4, on mentionne brièvement quelques formules concernant
l'entropie d'évolution H dans le contexte des modèles en temps discret avec un
environnement périodique, en particulier la relation avec le taux de croissance
l. Une étude détaillée comprenant aussi les environnements aléatoires se trouve
dans (Arnold et coll., 1994).
2. Analyse de sensibilité
2.1 La formule (6)
Commençons par quelques remarques préliminaires avant de prouver la formule
(6). \(p(t)\) est un vecteur avec \(k_t\) composantes. Pour tout entier t,
\(A(t)\) est une matrice positive avec \(k_{t+1}\) lignes et \(k_t\) colonnes. De
plus, \(k_{t+m}=k_t\) et \(A(t+m)=A(t)\). La taille de la matrice carrée C
donnée par (5) est \(\kappa=k_0+\cdots+k_{m-1}\). Le rayon spectral de C est l.
On suppose que la matrice C est irréductible. C'est en particulier le cas si C
n'a pas de ligne ou de colonne nulle et si \(A^*(0)\) est irréductible (Berman et
Plemmons, 1979, théorème 2.2.33). Il résulte du théorème de Perron et Frobenius
(Seneta, 2006, théorème 1.5) que l'on peut trouver un vecteur propre à gauche L
et un vecteur propre à droite R de la matrice C associés à la valeur propre l,
\begin{equation}\tag{10} L\, C=\lambda\, L\ ,\quad C\, R=\lambda\, R\, ,
\end{equation} et toutes les composantes des deux vecteurs sont strictement
positives. Les vecteurs L et R sont uniques à une constante multiplicative près.
Écrivons \(L=(\ell(0),\ldots,\ell(m-1))\) et \(R=(r(0),\ldots,r(m-1))\), où
chaque \(\ell(t)\) et \(r(t)\) est un vecteur avec \(k_t\) composantes. De plus,
étendons la définition de \(\ell(t)\) et de \(r(t)\) à tous les entiers t de
sorte que \(\ell(t+m)=\ell(t)\) et \(r(t+m)=r(t)\). De cette manière, (10) peut
se réécrire pour tout t sous la forme \begin{equation}\tag{11} \ell(t+1)\, A(t)
=\lambda\, \ell(t)\, ,\quad A(t)\, r(t) = \lambda\, r(t+1)\, . \end{equation} Un
calcul simple montre que \(C^m\) est la matrice diagonale par blocs:
\begin{equation}\tag{12} C^m=\mathrm{diag}\bigl [A^*(0),\ldots,A^*(m-1)\bigr ],
\end{equation} et \(A^*(t)\) est donné par (3). Parce que l est le rayon spectral
de C, \(\lambda^m\) est le rayon spectral de \(C^m\). Les
matrices \(A^*(t)\) avec \(0\leq t \leq m-1\) sont des permutations cycliques
l'une de l'autre. Elles ont donc le même rayon spectral que \(A^*(0)\). On l'a
noté L dans l'introduction. Donc L est aussi le rayon spectral de la matrice du
côté droit de (12) et \(\Lambda=\lambda^m\). Avec (10), on a \[L C^m=\lambda^m
L, \quad C^m R=\lambda^m R.\] En utilisant (12), \[\ell(t) A^*(t)=\lambda^m
\ell(t),\quad A^*(t)\, r(t)=\lambda^m r(t).\] Donc \(\ell(t)\) est aussi un
vecteur propre à gauche et \(r(t)\) un vecteur propre à droite
de \(A^*(t)\) associé à la valeur propre \(\Lambda=\lambda^m\). En utilisant
(11), on a \[\langle \ell(t+1),p(t+1)\rangle = \langle \ell(t+1),A(t)\,
p(t)\rangle = \langle \ell(t+1)A(t),p(t)\rangle = \lambda \, \langle
\ell(t),p(t)\rangle.\] On a donc \begin{equation}\tag{13} \forall t\geq
\tau,\quad \langle \ell(t),p(t)\rangle = \lambda^{t-\tau} \langle
\ell(\tau),p(\tau)\rangle\, . \end{equation} Autrement dit, la valeur
reproductive totale croît exponentiellement comme dans les modèles en temps
continu dans un environnement constant (Fisher, 1930) ou périodique (Bacaër et
Abdurahman, 2008, appendice A). Noter que la définition de la valeur reproductive
utilisée par Tuljapurkar (2000, équation (3.1.8)) pour des modèles dans un
environnement variable arbitraire ne coïncide pas avec la nôtre quand elle est
specialisée au cas périodique. De (11), on voit aussi que si \(\tau=0\) et
\(p(0)=r(0)\,\), on a \(p(t)=\lambda^{t}\, r(t)\). De (13), on obtient
\begin{equation}\tag{14} \langle \ell(t),r(t)\rangle=\langle
\ell(0),r(0)\rangle\, . \end{equation} Puisque la matrice C est supposée
irréductible, la valeur propre l est une valeur propre simple (Seneta, 2006,
théorème 1.5). Avec \(1\leq \alpha,\beta\leq \kappa\,\), il résulte de (Caswell,
1978, équation (10)) ou de la théorie classique des perturbations (Kato, 1984)
que \begin{equation}\tag{15} \frac{\partial \lambda}{\partial C_{\alpha,\beta}} =
\frac{L_{\alpha}\, R_{\beta}}{\langle L,R\rangle}\, . \end{equation}
\(L_{\alpha}\) est l'élément en position a de L, et \(R_{\beta}\) est l'élément
en position b du vecteur R. Mais noter que
si \(\alpha=k_0+\cdots+k_t+i\) (modulo \(\kappa\))
et \(\beta=k_0+\cdots+k_{t-1}+j\) avec \(0\leq t\leq m-1\), \(1\leq i\leq
k_{t+1}\) et \(1\leq j\leq k_t\,\), on
a \(C_{\alpha,\beta}=A_{i,j}(t)\), \(L_{\alpha}=\ell_i(t+1)\), \(R_\beta=r_j(t)\,
\), et \begin{equation}\tag{16} \langle L,R\rangle = \sum_{\eta=0}^{m-1} \langle
\ell(\eta),r(\eta)\rangle = m\, \langle \ell(0),r(0)\rangle \end{equation} à
cause de (14). Donc la formule de sensibilité (6) résulte finalement de (15).
Parce que \(\Lambda=\lambda^m\,\), il y a un lien évident entre la formule de
sensibilité pour l et celle pour L \begin{equation}\tag{17} \frac{\partial
\Lambda}{\partial A_{i,j}(t)} = m\, \lambda^{m-1}\, \frac{\partial
\lambda}{\partial A_{i,j}(t)}\ . \end{equation}
2.2 Limite continue des modèles structurés par l'âge
Considérons comme dans (Skellam, 1967) le cas particulier où chaque matrice
\(A(t)\) est une « matrice de Leslie » de taille fixée k \[ A(t)=\left
(\begin{array}{ccccc} f_1(t) & f_2(t) &\cdots & f_{k-1}(t) & f_{k}(t) \\ s_1(t) &
0 &\cdots &0 & 0\\ 0 & s_2(t) &\ddots & & 0\\ \vdots &\ddots & \ddots & \ddots &
\vdots\\ 0 &\cdots &0 & s_{k-1}(t) & 0 \end{array}\right). \] Avec (6), on a
\begin{equation}\tag{18} \frac{\partial \lambda}{\partial f_i(t)}=
\frac{\ell_1(t+1)\ r_{i}(t)}{ m\, \langle \ell(0),r(0)\rangle}\ ,\quad
\frac{\partial \lambda}{\partial s_i(t)}= \frac{\ell_{i+1}(t+1)\ r_{i}(t)}{ m\,
\langle \ell(0),r(0)\rangle}\ . \end{equation} Ce sont les généralisations au cas
périodique des formules donnés par exemple dans (Goodman, 1971). Considérons
maintenant la limite continue de ce modèle, avec un pas de temps \(\delta\to
0\,\), avec \(k\to +\infty\) et \(m\to +\infty\) mais avec \(m\,
\delta=\theta\) constant. La fonction discrète \(f_i(t)\) s'approchera, avec un
petit abus dans la notation, d'une fonction
continue \(f(t,x)\) avec \(f_i(t)\simeq f(t\, \delta, i\, \delta)\, \delta\). De
même, on peut introduire un taux de mortalité continu \(\mu(t,x)\) et des
fonctions propres continues \(\ell(t,x)\) et \(r(t,x)\) associées à la limite
continue du modèle de Leslie, à savoir les équations de McKendrick et von
Foerster. Voir (Michel et coll., 2005, équations (5.5)-(5.6)) et (Bacaër et
Abdurahman, 2008, équations (5) et (7)). Pour une petite perturbation \(f_i(t)=
f_i^{(0)}(t)+\varepsilon\, f_i^{(1)}(t)\,\), le taux de croissance par période L
est tel que \(\Lambda=\Lambda^{(0)}+\varepsilon\, \Lambda^{(1)} +
o(\varepsilon)\) si \(\varepsilon\to 0\,\), avec d'après (16), (17) et (18),
\[\Lambda^{(1)} = m\, \bigl (\Lambda^{(0)}\bigr )^{\frac{m-1}{m}} \
\frac{\sum_{t=0}^{m-1} \sum_{i=1}^{k} \ \ell_1^{(0)}(t+1)\ r_{i}^{(0)}(t)\
f_i^{(1)}(t)}{\sum_{t=0}^{m-1} \sum_{i=1}^{k} \ell_i^{(0)}(t)\, r_i^{(0)}(t)}\,\,
.\] À la limite \(m\to +\infty\,\), on obtient \begin{equation}\tag{19}
\Lambda^{(1)} = \theta\, \Lambda^{(0)}\, \frac{\int_0^\theta \int_0^\infty
\ell^{(0)}(t,0)\ r^{(0)}(t,x)\ f^{(1)}(t,x)\ dx\ dt}{\int_0^\theta \int_0^\infty
\ell^{(0)}(t,x)\ r^{(0)}(t,x)\ dx\ dt}\, . \end{equation} Entre le taux de
croissance par période L et le taux de croissance instantané r, on a la relation
\[\Lambda=e^{\rho\, \theta}.\] On a donc \(\rho=\rho^{(0)}+\varepsilon\,
\rho^{(1)}+o(\varepsilon)\) avec \(\Lambda^{(1)}=\theta\, \Lambda^{(0)}\,
\rho^{(1)}\). Avec (19), on obtient une formule pour \(\rho^{(1)}\) qui est
identique à (Bacaër et Abdurahman, 2008, équations (8) et (11)), comme on pouvait
s'y attendre. Une limite similaire dans (18) donne la sensibilité par rapport à
\(s_\alpha(t)\). On obtient les formules (8) et (10) de Bacaër et Abdurahman
(2008), qui correspondent à de petites variations du taux de mortalité dans le
modèle en temps continu.
3. La reproductivité
3.1 Définition dans le cas périodique
Pour les équations de renouvellement \begin{equation}\tag{20}
n(t)=\sum_{x=1}^\infty K(t,x)\, n(t-x)\quad , \quad n(t)=\sum_{x=1}^t K(t,x)\,
n(t-x)+\nu(t) \end{equation} avec une matrice positive
\(K(t,x)\) avec \(K(t+m,x)=K(t,x)\) pour un entier m, on définit la
reproductivité \(\mathcal{R}_0\) comme le rayon spectral de l'opérateur linéaire
\begin{equation}\tag{21} u(t)\longmapsto \sum_{x=1}^\infty K(t,x)\, u(t-x)
\end{equation} sur l'espace des fonctions discrètes périodiques de période m. Des
conditions sur le noyau K et sur n, semblables à celles de (Thieme, 1984) pour
des équations de renouvellement périodiques continues en temps, peuvent garantir
que \(\mathcal{R}_0=1\) est bien le seuil pour le comportement asymptotique de la
seconde équation de renouvellement dans (20). Mentionnons qu'une définition
de \(\mathcal{R}_0\) semblable à (21) est donnée dans (Bacaër et Guernaoui, 2006
; Bacaër, 2007 ; Bacaer et Ouifki, 2007) pour les modèles en temps continu. Dans
un environnement constant, on a \(K(t,x)=K(x)\). La définition basée sur (21)
implique facilement que \(\mathcal{R}_0\) est le rayon spectral de la matrice de
prochaine génération \(\sum_{x=1}^\infty K(x)\), ce qui est la définition usuelle
de \(\mathcal{R}_0\) dans un environnement constant (Diekmann et Heesterbeek,
2000). Dans le §3.3, on montrera que \(\mathcal{R}_0=1\) sert de seuil dans le
cas particulier du §3.2.
3.2 Calcul de \(\mathcal{R}_0\) si \(A(t)=F(t)+T(t)\)
Prenons le modèle (7). Le vecteur des naissances au temps t est \[n(t)=F(t)\,
p(t).\] On a alors \[p(t)=n(t-1)+T(t-1)\, p(t-1),\] \[n(t)=F(t) n(t-1)+F(t)
T(t-1)\, p(t-1).\] En répétant ce processus, on obtient pour \(n(t)\) une
équation de renouvellement (20) avec \begin{equation}\tag{22} K(t,x)=F(t)\,
T(t-1)\, T(t-2)\cdots T(t-x+1),\quad \forall x\geq 1. \end{equation} Avec x=1, on
a \(K(t,1)=F(t)\) : un produit « vide » de matrices ést égal à la matrice
identité.
Maintenant que \(K(t,x)\) a été identifié, \(\mathcal{R}_0\) est le rayon
spectral de (21). Notre but est de montrer que c'est aussi le rayon spectral
d'une certaine matrice, à savoir (8). Noter que d'un point de vue pratique, il
est facile de demander à un logiciel mathématique de calculer le rayon spectral
de (8). Tournons-nous vers la preuve. On d&efinit \[T^*(t)=T(t-1)\cdots
T(t-m)=T(t-1)\cdots T(0)\, T(m-1)\cdots T(t),\quad 0\leq t\leq m-1\,.\] Noter que
le rayon spectral de \(T^*(t)\) est le même que celui de sa permutation
circulaire \(T^*(0)\), qui est strictement inférieure à 1 par hypothèse.
\(I-T^*(t)\) est donc inversible et \(\sum_{j=0}^\infty T^*(t)^j=\bigl
[I-T^*(t)\bigr ]^{-1}\). Avec une fonction périodique \(u(t)\,\), un simple
changement d'indices et (22) donnent \begin{align} \sum_{x=1}^\infty K(t,x)\,
u(t-&x)= F(t) \sum_{s=0}^{m-1} \Theta_{t,s} \, u(s) \, ,\quad 0\leq t\leq m-1,
\tag{23} \end{align} avec \[\Theta_{t,s}= \sum_{j=0}^\infty T(t-1) \cdots
T(s+1-mj) = \bigl [I-T^*(t)\bigr ]^{-1} T(t-1)\cdots T(s+1),\quad 0\leq s\leq
t-1, \] \[\Theta_{t,s} = \sum_{j=1}^\infty T(t-1)\cdots T(s+1-mj) = \bigl
[I-T^*(t)\bigr ]^{-1} T(t-1)\cdots T(s+1-m),\quad t\leq s\leq m-1.\]
Mais \(\mathcal{R}_0\) est le rayon spectral de l'opérateur linéaire (21) sur
l'espace des fonctions périodiques de période m à valeurs dans
\(\mathbb{R}^{k_t}\) au temps t. Cet espace s'identifie avec l'ensemble des
vecteurs \((u(0),\ldots,u(m-1))\in \mathbb{R}^{k_0}\times \cdots \times
\mathbb{R}^{k_{m-1}}\). Donc (23) montre que \(\mathcal{R}_0\) est aussi le
rayon spectral de la matrice \(\mathcal{F} \Theta\),
* \(\mathcal{F}=\mathrm{diag}\bigl [F(0),\ldots,F(m-1)\bigr ]\)
* \(\Theta\) est un tableau \(m\times m\) de sous-matrices, avec
\(\Theta_{t,s}\) \((0\leq t,s\leq m-1)\) dans la « ligne » \(t+1\) et «
colonne » \(s+1\).
\(\mathcal{N}^{-1}\) est la matrice du côté droit de (8). On vérifie facilement
que \(\Theta\) multiplié par \(\mathcal{N}\) donne la matrice identité. On a
donc \(\Theta=\mathcal{N}^{-1}\) et \(\mathcal{R}_0\) est le rayon spectral de
la matrice \(\mathcal{F} \mathcal{N}^{-1}\).
3.3 Inégalités entre \(\mathcal{R}_0\) et \(\lambda\)
La preuve est une généralisation au cas périodique de celle de (Li et
Schneider, 2002) et repose sur des propriétés des matrices positives, pas
nécessairement irréductibles, qui sont résumées dans (Berman et Plemmons, 1979,
p. 26-30). Introduisons la notation \(\sigma(\cdot)\) pour le rayon spectral
d'une matrice et la notation \[\mathrm{sousdiag} (A(t);\, 0\leq t\leq m-1)\] pour
la matrice (5). Parce que \[\mathcal{R}_0=\sigma(\mathcal{F}
\mathcal{N}^{-1})=\sigma(\mathcal{N}^{-1} \mathcal{F})\] et parce
que \(\mathcal{N}^{-1} \mathcal{F}\) est une matrice positive, il existe d'après
(Berman et Plemmons, 1979, théorème 2.1.1) un vecteur positif et non nul
\(\Phi=(\phi(0),\ldots,\phi(m-1))\) avec \[\mathcal{N}^{-1} \mathcal{F} \Phi=
\mathcal{R}_0 \Phi.\] On a donc \(\mathcal{F} \Phi= \mathcal{R}_0\, \mathcal{N}
\Phi\,\), c'es-à-dire \[F(t) \phi(t) = \mathcal{R}_0 (-T(t)
\phi(t)+\phi(t+1)),\quad 0\leq t\leq m-1,\] avec \(\phi(m)=\phi(0)\). Supposons
désormais que \(\mathcal{R}_0 > 0\). On a alors \begin{equation}\tag{24}
(F(t)/\mathcal{R}_0+T(t))\phi(t)=\phi(t+1). \end{equation}
Mais \(C=\mathrm{sousdiag}(F(t)+T(t);\, 0\leq t \leq m-1)\) est irréductible par
hypothèse. Comme l'irréductibilité d'une matrice ne dépend que de la nullité des
entrées (Berman et Plemmons, 1979, théorème 2.2.7), la
matrice \(\mathrm{sousdiag}(F(t)/\mathcal{R}_0+T(t);\, 0\leq t \leq m-1)\) est
aussi irréductible. L'équation (24) montre que \(\Phi\) est un vecteur propre
positif de cette dernière matrice associé à la valeur propre 1. Donc les
composantes de \(\Phi\) sont en réalité strictement positives (Berman et
Plemmons, 1979, théorème 2.1.4). Il résulte de (Berman et Plemmons, 1979,
corollaire 2.1.12) que \[\sigma \Bigl (\mathop{\mathrm{sousdiag}}_{0\leq t\leq
m-1} \Bigl (\frac{F(t)}{\mathcal{R}_0}+T(t)\Bigr ) \Bigr ) = 1.\] Supposons
d'abord que \(\mathcal{R}_0\geq 1\). Pour deux matrices
positives \(M_1\) et \(M_2\), \(M_1\leq M_2 \Rightarrow \sigma(M_1)\leq
\sigma(M_2)\) (Berman et Plemmons, 1979, théorème 2.1.5). On a donc
\begin{align*} 1&=\sigma \Bigl (\mathop{\mathrm{sousdiag}}_{0\leq t\leq m-1}
\Bigl (\frac{F(t)}{\mathcal{R}_0}+T(t)\Bigr ) \Bigr ) \leq \sigma \Bigl
(\mathop{\mathrm{sousdiag}}_{0\leq t\leq m-1} \Bigl (F(t)+T(t)\Bigr ) \Bigr
)=\lambda\leq \nonumber\\ &\leq \sigma \Bigl (\mathop{\mathrm{sousdiag}}_{0\leq
t\leq m-1} \Bigl (F(t) +\mathcal{R}_0 T(t)\Bigr ) \Bigr ) = \mathcal{R}_0\,
\sigma \Bigl (\mathop{\mathrm{sousdiag}}_{0\leq t\leq m-1} \Bigl
(\frac{F(t)}{\mathcal{R}_0} + T(t)\Bigr ) \Bigr ) = \mathcal{R}_0. \end{align*}
On a ainsi \(1\leq \lambda\leq \mathcal{R}_0\). La même preuve fonctionne pour le
cas où \(\mathcal{R}_0\leq 1\) mais avec tous les \(\leq\) remplacés
par \(\geq\). Ceci donne \(1\geq \lambda\geq \mathcal{R}_0\).
3.4 Une interprétation
La sous-matrice \((\mathcal{F} \mathcal{N}^{-1})_{t,s}=F(t)
\Theta_{t,s}\) est une matrice avec \(k_{t+1}\) lignes et \(k_{s+1}\) colonnes.
Avec la définition de \(\Theta_{t,s}\,\), on peut vérifier que l'entrée dans la
ligne i et la colonne j de \(F(t) \Theta_{t,s}\) est l'espérance du nombre de
descendants nés dans le compartiment i entre les temps t et t+1 (modulo m) d'un
individu né dans le compartiment j entre les temps s et s+1 (modulo m).
Donc \(\mathcal{F} \mathcal{N}^{-1}\) est une sorte de matrice de prochaine
génération (Diekmann et Heesterbeek, 2000), la population étant structurée par
saison de naissance comme dans (Gourley et Lawrence, 1977) ou (Caswell, 2001,
§13.3.1).
4. Quelques remarques sur l'entropie
On suppose
* \(p(t+1)=A(t)\, p(t)\) avec la condition initiale \(p(\tau)\)
* \(A(t)\) est une matrice positive et périodique de période m
* la matrice C donnée par (5) est irréductible
* la matrice \(A^*(\tau)\) définie par (3) est primitive.
Avec \(\lambda\), \(\ell(t)\) et \(r(t)\) définis comme ci-dessus, \begin{align}
&\pi_i(t)=\frac{\ell_i(t)\, p_i(t)}{\lambda^{t-\tau}
\langle\ell(\tau),p(\tau)\rangle}\, \quad \omega_i(t)=\frac{\ell_i(t)\,
r_i(t)}{\langle\ell(0),r(0)\rangle}\, ,\tag{25}\\ &P_{i,j}(t)=\frac{\ell_j(t+1)\,
A_{j,i}(t)}{\lambda\, \ell_i(t)}\, ,\quad Q_{i,j}(t)=\frac{A_{i,j}(t)\,
r_j(t)}{\lambda\, r_i(t+1)}\, .\tag{26} \end{align} Noter que (13) et (14)
impliquent que \(\pi(t)\) et \(\omega(t)\) définis par (25) sont des vecteurs de
probabilité, avec \(\omega(t+m)=\omega(t)\). L'équation \(p(t+1)=A(t)\,
p(t)\) est équivalente à \(\pi(t+1)=\pi(t)\, P(t)\). La première équation dans
(11) est équivalente à
* \(P(t)\) est une matrice stochastique par lignes
* \(\omega(t)=\omega(t+1)\, Q(t)\).
La seconde équation dans (11) est équivalente à
* \(Q(t)\) est une matrice stochastique par lignes
* \(\omega(t+1)=\omega(t)\, P(t)\).
Noter aussi que \[Q_{i,j}(t)=\omega_j(t)\, P_{j,i}(t)/\omega_i(t+1).\]
\(P(t)\) définit donc une chaîne de Markov inhomogène progressive avec une
distribution stationnaire périodique en temps \(\omega(t)\,\), tandis
que \(Q(t)\) définit une chaîne de Markov rétrograde.
Le taux d'entropie, ou « entropie d'évolution », de ces chaînes de Markov
périodiques en temps est \begin{equation} H=-\frac{1}{m} \sum_{t=0}^{m-1}
\sum_{i,j} \omega_i(t)\, P_{i,j}(t)\, \log P_{i,j}(t)\, .\tag{27} \end{equation}
Si m=1, les équations (25), (26) et (27) coïncident avec les formules de
(Demetrius, 1974 ; Demetrius et coll., 2004 ; Demetrius et coll., 2007). En fait
le cas inhomogène en temps, y compris le cas des environnements aléatoires, a
déjà été bien étudié (Arnold et coll., 1994). Pour les chaînes de Markov
périodiques, voir aussi (Ge et coll., 2006).
Comme dans un environnement constant, on peut vérifier que l'entropie est
liée au taux de croissance l par l'équation \(\log \lambda = H + \Phi\) si le «
potentiel reproductif » \(\Phi\) est défini par \[\Phi= \frac{1}{m}
\sum_{t=0}^{m-1} \sum_{i,j} \omega_i(t)\, P_{i,j}(t)\, \log A_{j,i}(t).\] En
effet, la stochasticité par lignes de \(P(t)\) et
l'équation \(\omega(t+1)=\omega(t) P(t)\) impliquent que \begin{align*}
H+\Phi-\log \lambda&= \frac{1}{m} \sum_{t=0}^{m-1} \sum_{i,j} \omega_i(t)\,
P_{i,j}(t)\, [\log \ell_i(t) - \log \ell_j(t+1)]=0. \end{align*} Comme dans un
environnement constant, \(\Phi\) est en général différent de zéro. Donc maximiser
H est différent de maximiser \(\rho=\log \lambda\). Mais contrairement aux
environnements constants, il n'y a pas de formules simples pour les vecteurs
propres \(\ell(t)\) et \(r(t)\) même si l'on suppose que \(A(t)\) est une
matrice de Leslie. En conséquence, il semble difficile d'obtenir des formules
simples explicites pour la sensibilité de H par rapport aux entrées
\(A_{i,j}(t)\). On ne peut utiliser que des méthodes numériques.
Il serait intéressant de montrer pour des versions périodiques des modèles
considérés par (Demetrius et coll., 2007 ; Demetrius et Ziehe, 2007 ; Demetrius
et coll., 2009) que H est encore une bonne mesure de valeur adaptative
darwinienne. Cela pourrait être l'objet d'un travail futur.
5. Conclusion
Cet article propose deux nouvelles formules: l'une pour la sensibilité du
taux de croissance dans un environnement périodique qui est plus simple que celle
de Caswell et Trevisan; l'autre pour la reproductivité dans un environnement
périodique. Par ailleurs, on généralise au cas périodique des inégalités entre l
et \(\mathcal{R}_0\) prouvées par Cushing et Zhou dans un environnement constant.
On généralise aussi au cas périodique une équation reliant le taux de croissance
et l'entropie d'évolution.
À notre avis, la formule pour \(\mathcal{R}_0\) dans un environnement
périodique est celle qui a le plus de chance d'être utile à court terme. Le
paramètre \(\mathcal{R}_0\) est effet devenu très populaire parmi les
épidémiologistes. Une conférence a même été organisée uniquement sur ce sujet
(Paris, 29-31 octobre 2008). De plus il y a un intérêt grandissant pour le
changement climatique, une des conséquences potentielles étant l'émergence ou la
résurgence de maladies à vecteurs, telles que le paludisme, la dengue, la fièvre
du Nil occidental ou le chikungunya, dans des régions où ces maladies avaient
disparu. Ces maladies présentent toutes de fortes fluctuations saisonnières dues
à la population de vecteurs. \(\mathcal{R}_0\) est intimement lié au pourcentage
de vecteurs qui doivent être tués ou au pourcentage de personnes qui doivent être
vaccinées pour éviter des épidémies. La méthode habituelle de calcul de
\(\mathcal{R}_0\) « localement » pour chaque mois de l'année en utilisant les
densités mensuelles de vecteurs n'a pas de fondement en terme de seuil épidémique
dès que l'échelle de temps d'une épidémie dépasse quelques mois. Notre formule
pour \(\mathcal{R}_0\) donne bien le seuil correct. On peut aussi utiliser cette
formule pour étudier la sensibilité à un petit changement climatique, en
particulier si le changement n'est pas uniforme dans l'année, avec par exemple
des températures estivales supérieures mais des températures hivernales
inférieures. Certains paramètres des modèles tels que les taux de fertilité et de
mortalité et les périodes d'incubation peuvent être directement liés à la
température.
Remerciements
Les sections 3 et 4 ont été ajoutées suite aux commentaires des rapporteurs.
J.A.J. Metz et O. Diekmann ont suggéré l'interpretation du §3.4.
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