Ergebnis für URL: http://www.ummisco.ird.fr/perso/bacaer/2008JMB.html Résonance du seuil épidemique dans un environnement périodique
J. Math. Biol. 57 (2008) p. 649-673
Nicolas Bacaër
Institut de recherche pour le développement
32 avenue Henri Varagnat, 93143 Bondy, France
nicolas.bacaer@ird.fr
Xamxinur Abdurahman
Département de mathématiques et sciences des systèmes, Université du Xinjiang,
Urumqi, Chine
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Résumé
Il y a eu de nombreuses études sur la résonance entre la période naturelle d'une
maladie endémique et un taux de contact saisonnier périodique. Cet article ne se
focalise pas sur la résonance pour des maladies endémiques mais sur la résonance
pour des maladies émergentes. La périodicité peut avoir une grande influence sur
le taux de croissance initial et donc sur le seuil épidémique. Il y a résonance
quand l'équation d'Euler-Lotka a une racine complexe dont la partie imaginaire
(c'est-à-dire la fréquence naturelle) est proche de la pulsation du taux de
contact et dont la partie réelle n'est pas trop éloignée du paramètre malthusien.
C'est une sorte d'analogue en temps continu des travaux de Tuljapurkar sur les
modèles de population en temps discret. On illustre ce phénomène de résonance sur
plusieurs modèles simples d'épidemies avec des contacts qui varient
périodiquement de manière hebdomadaire. On explique les différences surprenantes
entre un modèle SEIR périodique avec une période de latence distribuée
exponentiellement et le même modèle avec une période de latence fixe.
1. Introduction
Depuis au moins le travail de 1932 de Kermack et McKendrick, on sait que les
maladies infectieuses peuvent présenter des oscillations amorties près d'un état
d'équilibre endémique. En effet, en utilisant un modèle simple formé d'un système
d'équations différentielles ordinaires, ils montrèrent que les valeurs propres de
la matrice jacobienne en ce point d'équilibre peuvent être complexes. Ces valeurs
propres déterminent une période naturelle d'oscillation. Depuis les années 1970
et en particulier depuis l'essor de la « théorie du chaos », de nombreux travaux
ont montré que la résonance entre cette période naturelle et un taux de contact
saisonnier périodique ou un autre facteur périodique pouvait induire un
comportement dynamique inattendu.
Ceci se produit même pour des modèles mathématiques non linéaires très
simples (Dietz, 1974 et 1976 ; Grossman et coll., 1977 ; Grossman, 1980 ; Smith,
1983a et 1983b ; Schwartz et Smith, 1983 ; Aron et Schwartz, 1984 ; Schwartz,
1985 ; Schaffer, 1985 ; Hethcote et Levin, 1989 ; Olsen et Schaffer, 1990 ; Rand
et Wilson, 1991 ; Grenfell, 1992 ; Bolker et Grenfell, 1993 ; Kuznetsov et
Piccardi, 1994 ; Grenfell et coll., 1995 ; Glendinning et Perry, 1997 ; Earn et
coll., 2000 ; Keeling et coll., 2001 ; Keeling et Grenfell, 2002 ; Billings et
Schwartz, 2002 ; Kamo et Sasaki, 2002 ; Dushoff et coll., 2004 ; Greenman et
coll., 2004 ; Ireland et coll., 2004 ; Zeng et coll., 2005 ; Altizer et coll.,
2006 ; Choisy et coll., 2006 ; Grassly et Fraser, 2006 ; Ireland et coll., 2007 ;
Moneim, 2007a et 2007b).
Premièrement, si les équations linéarisées près de l'équilibre endémique ont
une valeur propre complexe avec une partie imaginaire y proche de la pulsation w
du taux de contact et avec une partie réelle x proche de 0, alors des
oscillations relativement petites du taux de contact peuvent causer de grandes
oscillations de la prévalence. Deuxièmement, quand \(y/\omega\) est proche d'un
nombre rationnel \(p/q\neq 1\) avec p et q petits, et pour des amplitudes
d'oscillations suffisamment grandes du taux de contact, la prévalence peut
osciller à une fréquence sous-harmonique. Du chaos peut également apparaître pour
certaines plages des valeurs des paramètres. De cette manière, la théorie
explique les séries temporelles pour l'incidence de certaines maladies telles que
la rougeole, qui fut à une époque endémique mais avec des pics épidémiques à peu
près tous les deux ans dans certaines villes (Soper, 1929), et dont on pensait
par conséquent que la « période naturelle » d'oscillation près de son équilibre
endémique était proche de deux ans. En écologie, il y a également des phénomènes
de résonance similaires entre un environnement fluctuant et une période naturelle
d'oscillation près d'un état d'équilibre non nul (Gurney et Nisbet, 1980 ; Nisbet
et Gurney, 1982, chapitre 3).
D'après (Lotka, 1939a, p. 73 ; Lotka, 1939b), l'équation caractéristique (ou
équation d'Euler-Lotka) pour les modèles démographiques linéaires en temps
continu a aussi des racines complexes, qui provoquent des ondes de population.
Lotka pensait qu'il y a toujours une infinité de telles racines et que l'une
d'entre elle a en général une période naturelle associée proche d'une génération,
soit deux ou trois décennies pour des populations humaines. A. J. Coale a étudié
le cas d'une fertilité périodique et a remarqué un accroissement significatif du
taux de croissance du modèle lorsque la période de la fertilité est proche d'une
génération, un phénomène qu'il a aussi appelé résonance (Coale, 1972, figure
6.8). (Kim et Schoen, 1996 ; Schoen et Kim, 1997 ; Schoen, 2006) ont également
étudié la résonance de l'amplitude des oscillations, mais pas la résonance du
taux de croissance, dans les modèles linéaires en temps continu. (Tuljapurkar,
1985 et 1990), (Caswell, 2001, § 13.3.2) et (Keyfitz et Caswell, 2005, § 7.3.2)
ont étudié la résonance dans les modèles matriciels linéaires en temps discret:
étant donnée la transformation exponentielle qui relie les modèles en temps
discret et ceux en temps continu, la résonance se produit quand la matrice qui
décrit la croissance dans un environnement constant a une valeur propre complexe
\(x+\mathrm{i}\, y\) avec \(\arctan(y/x)\) proche de w et avec un module
proche du rayon spectral de la matrice. À nouveau, (Tuljapurkar, 1985) se
concentre sur la résonance de l'amplitude des oscillations mais pas sur la
résonance du taux de croissance.
Les modèles mathématiques que l'on obtient par linéarisation de modèles
épidémiques non linéaires près de l'équilibre sans maladie (et non l'équilibre
endémique) sont très semblables aux modèles de population linéaires mentionnés
dans le paragraphe précédent; la variable âge est remplacée par le temps écoulé
depuis l'infection. Par conséquent, on s'attend à ce que la résonance du taux de
croissance initial puisse aussi se produire dans un environnement périodique, ce
qui change considérablement le seuil épidémique. Cela peut avoir des conséquences
importantes pour les maladies émergentes. Noter cependant que pour beaucoup de
maladies transmises par voie aérienne, le temps moyen entre deux générations
d'infectés est de l'ordre d'une ou deux semaines; cela dépend de la période de
latence. Ainsi la résonance n'est probable que si le taux de contact varie avec
une période du même ordre de grandeur, typiquement s'il varie de manière
hebdomadaire. Pour les enfants scolarisés, les contacts diminuent pendant les
week-ends. On peut aussi imaginer une maladie infectieuse pour des animaux vendus
une fois par semaine sur un marché.
La section 2 rappelle comment calculer le taux de croissance dans les modèles
de population qui sont linéaires, périodiques et continus en temps. On donne une
formule générale pour la perturbation du premier ordre; elle fait intervenir la
notion de valeur reproductive dans un environnement périodique. Mais pour une
petite perturbation périodique d'un modèle avec des coefficients qui ne dépendent
pas du temps, cette formule montre qu'il est nécessaire d'inclure un terme de
second ordre pour étudier la résonance du taux de croissance.
La section 3 présente trois méthodes différentes pour étudier la résonance.
Les deux premières méthodes, l'une purement numérique, l'autre en partie
analytique, reposent sur nos travaux antérieurs (Bacaër et Guernaoui, 2006 ;
Bacaër, 2007 ; Bacaër et Ouifki, 2007). La troisième méthode suggère, comme on
peut s'y attendre, que la résonance du taux de croissance se produit si
* l'équation d'Euler-Lotka (Lotka, 1939a, p. 65) a une racine complexe
* la partie imaginaire est proche de la pulsation w du taux de contact
* la partie réelle est proche du paramètre malthusien.
Il y a aussi une autre condition technique.
La section 4 applique les trois méthodes à cinq modèles épidémiques
classiques avec des taux de contact périodiques pour montrer comment des modèles
avec seulement de légères différences peuvent avoir des propriétés bien
différentes:
* un modèle SIR avec une période infectieuse exponentielle, c'est-à-dire
distribuée exponentiellement; la résonance du taux de croissance initial y
est impossible. L'objectif est d'insister sur le fait que ce modèle est
exceptionnel dans le sens où le taux de croissance initial est même
complètement indépendant de la fréquence du facteur périodique. Ce modèle est
responsable de l'idée commune mais fausse suivant laquelle les modèles
linéarisés avec des coefficients périodiques se traitent facilement en
prenant la moyenne.
* un modèle SIR avec une période infectieuse fixe, pour lequel la résonance est
possible. Mais avec les valeurs des paramètres choisies ici, la résonance
s'avère très faible.
* un modèle SEIR avec une période de latence et une période infectieuse qui
sont distribuées exponentiellement; la résonance est impossible, comme
(Bacaër, 2007) l'a remarqué, mais le taux de croissance dépend du facteur
périodique, contrairement au premier modèle SIR.
* un modèle SEIR avec une période de latence fixe et une période infectieuse
distribuée exponentiellement, où contrairement aux modèles précédents une
forte résonance est possible, comme (Bacaër et Ouifki, 2007) l'a remarqué.
* un modèle SEIR avec une période de latence qui suit une distribution Gamma et
une période infectieuse distribuée exponentiellement; c'est une
généralisation des deux modèles précédents, qui montre comment la résonance
devient impossible lorsque la distribution de la période de latence passe
progressivement d'une fonction en escalier à une exponentielle.
Un point clé est que l'équation d'Euler-Lotka pour le modèle autonome peut bien
ne pas avoir de racine complexe autre que sa racine réelle (§4.1, §4.3), comme
(Feller, 1941) l'a déjà remarqué. Bien sûr, on sait depuis longtemps que deux
modèles épidémiques avec seulement une distribution différente pour le temps
passé dans un compartiment peuvent avoir des propriétés qualitatives différentes;
voir l'étude de l'existence de solutions périodiques pour les modèles épidémiques
autonomes (Hethcote et Levin, 1989, §3).
En résumé, la règle a priori raisonnable d'un point de vue biologique, selon
laquelle la résonance du seuil épidémique est importante lorsque la fréquence de
l'environnement est proche d'une fréquence naturelle de la maladie, ne marche pas
toujours. De manière surprenante, elle ne marche pas pour le modèles les plus
simples, les modèles SIR et SEIR avec des période de latence et d'infectiosité
distribuées exponentiellement. Cette règle doit être remplacée par une étude plus
précise des racines complexes de l'équation d'Euler-Lotka. Un phénomène de
résonance similaire peut se produire pour la reproductivité \(R_0\) (Bacaër et
Ouifki, 2007, figure 1). On devrait donc revoir les estimations de la
reproductivité pour les maladies se propageant dans un environnement périodique
tel que l'école.
Le premier appendice contient une preuve de la croissance de la valeur
reproductive totale d'une population dans un environnement périodique. Voir aussi
(Michel et coll., 2005). C'est un corollaire de notre étude et une généralisation
d'un résultat classique de R.A. Fisher pour les modèles de population autonomes
(Fisher, 1930, chapitre 2). Le second appendice explique pourquoi la définition
que l'on propose pour la valeur reproductive dans un environnement périodique
semble avoir de meilleures propriétés que la définition utilisée par Ediev (2001,
2007).
2. Formules de perturbation du premier ordre
2.1 Le taux de croissance initial
Lorsqu'on étudie la stabilité de l'équilibre sans maladie d'un modèle
épidémique, la première chose à faire est de linéariser le modèle près de cet
équilibre. Le système linéaire qui en résulte peut en général s'écrire comme une
équation intégrale de renouvellement \begin{equation}\tag{1} J(t)=\int_0^\infty
\Phi(t,x)\, J(t-x)\, \mathrm{d}x\, . \end{equation}
* \(J(t)\) est un vecteur colonne \((J_1(t),\ldots,J_n(t))^{\mathrm{T}}\,\),
avec l'indice k qui représente différents types de personnes infectées
* \(J_k(t)\) représente le nombre de nouvelles personnes qui entrent dans le
compartiment infecté k par unité de temps au temps t
* \(\Phi(t,x)\) est une matrice carrée de taille n et une fonction positive
qui est périodique de période T par rapport à t
* \(\Phi_{k,\ell}(t,x)\) est le nombre moyen d'infections par unité de temps,
de type k, produites au temps t par une personne qui a été infectée au temps
t-x, et qui était de type \(\ell\)
* x est le temps depuis l'infection.
Pour simplifier, on ne considérera que le cas \(n=1\) puisque c'est suffisant
pour les exemples que nous avons à l'esprit. Ce cas intervient par exemple (mais
pas seulement) lorsqu'on considère une population unique de personnes infectées
avec
* un taux de guérison \(\mu(t,x)\)
* un taux de contact effectif \(\beta(t,x)\) (produit du taux de contact et de
la probabilité de transmission par contact),
qui dépendent du temps t et de la durée x écoulée depuis l'infection. On suppose
* \(\mu(t+T,x)=\mu(t,x)\) et \(\beta(t+T,x)=\beta(t,x)\)
* \(i(t,x)\) est la densité de population infectée depuis x unités de temps au
temps t.
Dans l'approximation linéaire près de l'équilibre sans maladie, \(i(t,x)\) est
solution du système \begin{equation} \frac{\partial i}{\partial t}+\frac{\partial
i}{\partial x}+\mu(t,x)\, i(t,x)=0\, ,\quad i(t,0)=\int_0^\infty
\!\!\!\beta(t,x)\, i(t,x)\, \mathrm{d}x\, .\tag{2} \end{equation}
\(J(t)=i(t,0)\) est solution de (1) avec \begin{equation}\tag{3}
\Phi(t,x)=\ell(t-x,x)\, \beta(t,x)\quad ,\quad \ell(\tau,x)=\exp\Bigl (-\int_0^x
\mu(\tau+y,y)\, dy\Bigr )\, . \end{equation} Ici, \(\ell(\tau,x)\) est la
probabilité pour qu'une personne nouvellement infectée au temps t soit encore
infectée au temps \(\tau+x\). Le taux de croissance initial r de l'épidémie est
l'unique nombre réel pour lequel l'équation intégrale suivante a une solution
positive, non triviale et périodique de période T : \begin{equation}\tag{4}
p(t)=\int_0^\infty e^{-r x}\, \Phi(t,x)\, p(t-x)\, \mathrm{d}x \, ,
\end{equation} (Coale, 1972 ; Bacaër et Guernaoui, 2006 ; Bacaër, 2007 ; Bacaër
et Ouifki, 2007 ; Michel et coll., 2005 ; Thieme, 1984 ; Jagers et Nerman, 1985 ;
Williams et Dye, 1997). Comme dans (Michel et coll., 2005), c'est aussi l'unique
nombre réel tel qu'il existe une fonction \(u(t,x)\) positive, non triviale,
périodique de période T par rapport à t, avec \begin{align} &-\frac{\partial
u}{\partial t}-\frac{\partial u}{\partial x}-\mu(t,x)\, u(t,x)=r\, u(t,x)\,
,\quad u(t,0)=\int_0^\infty\!\!\! \beta(t,x)\, u(t,x)\, \mathrm{d}x\, ,\tag{5}
\end{align} et la condition de normalisation \begin{equation}\tag{6} \frac{1}{T}
\int_0^T \!\!\! \int_0^\infty \!\!\!u(t,x)\, \mathrm{d}x\, \mathrm{d}t =1\, .
\end{equation} Enfin, comme dans (Michel et coll., 2005), le taux de
croissance \(r\) est aussi l'unique nombre réel tel qu'il existe une
fonction \(v(t,x)\) positive, non triviale, périodique de période T par rapport
à t, avec \begin{align} &\frac{\partial v}{\partial t}+\frac{\partial v}{\partial
x}-\mu(t,x)\, v(t,x) + \beta(t,x)\, v(t,0) = r\, v(t,x)\, ,\tag{7} \end{align} et
la condition de normalisation \begin{equation}\tag{8} \langle u,v\rangle =
\frac{1}{T} \int_0^T \!\! \int_0^\infty \!\!\!u(t,x)\, v(t,x)\, \mathrm{d}x\,
\mathrm{d}t=1 . \end{equation} Le triplet \((r,u,v)\) est celui qui vient de la
théorie de Krein-Rutman pour les operateurs positifs (Michel et coll., 2005,
théorème 5.1).
\(v(t,x)\) est la valeur reproductive d'un individu infecté depuis x unités
de temps au temps t. Noter que dans les modèles
démographiques, \(\beta(t,x)\) serait la fécondité et \(\mu(t,x)\) la mortalité.
Sauf pour la normalisation, \(v(t,x)\) est la généralisation pour le modèle avec
des coefficients périodiques de la définition de Fisher pour la valeur
reproductive dans les modèles autonomes (Fisher, 1927 et 1930 ; Lotka et Fisher,
1927). Noter aussi que (Michel et coll., 2005) ne mentionne pas le lien avec la
notion de valeur reproductive. (Grafen, 2006) a présenté récemment des
généralisations dans d'autres directions.
Avec la présente définition de \(v(t,x)\,\), on peut facilement généraliser
un théorème dû à Fisher (1930, chapitre 2) : \begin{equation}\tag{9}
V(t)=\int_0^\infty \!\!\!i(t,x)\, v(t,x)\, \mathrm{d}x = V(0)\, e^{rt}\, ,
\end{equation} (voir l'appendice 1). C'est la raison principale pour laquelle la
définition que nous utilisons pour la valeur reproductive dans un environnement
périodique semble plus appropriée que celle de (Ediev, 2001 et 2007) (voir
l'appendice 2).
2.2 Formules perturbatives du premier ordre pour le taux de croissance du système (2)
Considérons d'abord le cas où \[\mu(t,x)=\mu_0(t,x)+\varepsilon\,
\mu_1(t,x),\] avec deux fonctions \(\mu_0(t,x)\) et \(\mu_1(t,x)\) qui sont
périodiques par rapport à \(t\). On écrit la première équation de (5) sous la
forme \[\mathcal{L}_\varepsilon u=r \, u.\] \(\mathcal{L}_\varepsilon\) est un
opérateur différentiel linéaire sur un espace de fonctions périodiques de période
T (par rapport à la variable t) qui satisfont la contrainte donnée par la seconde
équation de (5). Alors \[\mathcal{L}_\varepsilon=\mathcal{L}_0+\varepsilon\,
\mathcal{M}, \quad (\mathcal{M}u)(t,x)=-\mu_1(t,x)\, u(t,x).\]
\((r_0,u_0,v_0)\) est le triplet associé avec \(\mathcal{L}_0\). La théorie
perturbative des opérateurs linéaires (Kato, 1984) dit que la valeur propre
principale \(r_\varepsilon\) associée à \(\mathcal{L}_\varepsilon\) est donnée
par \[r_\varepsilon= r_0+\varepsilon\, \rho+o(\varepsilon),\quad \varepsilon\to
0\] (notations de Landau), avec \begin{equation} \rho=\langle
\mathcal{M}u_0,v_0\rangle = -\frac{1}{T}\int_0^T \!\!\!\int_0^\infty
\!\!\!\mu_1(t,x)\, u_0(t,x)\, v_0(t,x)\, \mathrm{d}x\ \mathrm{d}t\, .\tag{10}
\end{equation} Noter que \(\rho < 0\) si \(\mu_1 > 0\), comme il se doit.
De même, on peut considérer le cas où
\[\beta(t,x)=\beta_0(t,x)+\varepsilon'\, \beta_1(t,x),\] avec deux
fonctions \(\beta_0(t,x)\) et \(\beta_1(t,x)\) qui sont périodiques par rapport à
t. Écrivons (7) \[\mathcal{L}'_\varepsilon v=r\, v, \quad
\mathcal{L}'_\varepsilon=\mathcal{L}_0'+\varepsilon'\, \mathcal{N}, \quad
(\mathcal{N}v)(t,x)=\beta_1(t,x)\, v(t,0).\] Noter que \((r_0,v_0,u_0)\) est le
triplet associé à \(\mathcal{L}_0'\). La même théorie perturbative dit que la
valeur propre principale \(r_\varepsilon\) associée
à \(\mathcal{L}'_\varepsilon\) est donnée par \[r_\varepsilon= r_0+\varepsilon'\,
\rho'+o(\varepsilon'), \quad \varepsilon'\to 0\] avec \begin{equation}
\rho'=\langle \mathcal{N}v_0,u_0\rangle = \frac{1}{T}\int_0^T \!\!\! v_0(t,0)
\int_0^\infty \!\!\!\beta_1(t,x)\, u_0(t,x)\, \mathrm{d}x\ \mathrm{d}t\,
.\tag{11} \end{equation} Noter que \(\rho' > 0\) si \(\beta_1 > 0\), comme il se
doit.
2.3 Formules perturbatives du premier ordre pour le taux de croissance dans deux cas
particuliers
Coefficients indépendants du temps.
Avec \(\mu(t,x)=\mu(x)\) et \(\beta(t,x)=\beta(x)\,\), (4) montre que le taux de
croissance initial \(r\) est l'unique solution réelle de l'équation
d'Euler-Lotka \begin{equation}\tag{12} 1=\int_0^\infty e^{-r\, x}\, \Phi(x)\,
\mathrm{d}x\quad ,\quad \Phi(x)=\ell(x)\, \beta(x)\quad ,\quad \ell(x)=\exp\Bigl
(-\int_0^x \mu(y)\, dy\Bigr ). \end{equation} Les solutions de (5)-(6) et (7)-(8)
sont les formules bien connues dues à Lotka et Fisher pour la pyramide par âge et
pour la valeur reproductive: \begin{align}\tag{13} u(x)&=\frac{e^{-r x}\,
\ell(x)}{\int_0^\infty e^{-r y}\, \ell(y)\, dy}\, ,\quad v(x)= v(0) \int_x^\infty
\!\!\!e^{-r (y-x)} \frac{\ell(y)}{\ell(x)}\, \beta(y)\, dy\, . \end{align}
Avec \(\mu(x)=\mu_0(x)+\varepsilon
\mu_1(x)\) ou \(\beta(x)=\beta_0(x)+\varepsilon'\, \beta_1(x)\,\), alors (10) et
(11) deviennent \begin{equation} \rho=-\frac{\int_0^\infty \mu_1(x) \int_x^\infty
e^{-r_0 y}\, \ell_0(y)\, \beta_0(y)\, dy\ \mathrm{d}x}{\int_0^\infty x\, e^{-r_0
x}\, \ell_0(x)\, \beta_0(x)\, \mathrm{d}x}\ ,\quad \rho'=\frac{\int_0^\infty
e^{-r_0 x}\, \ell_0(x)\, \beta_1(x)\, \mathrm{d}x}{\int_0^\infty x\, e^{-r_0 x}\,
\ell_0(x)\, \beta_0(x)\, \mathrm{d}x}\ . \end{equation} Aux notations près, ces
formules sont dues à W.D. Hamilton (1966, équations (9) et (25)). Pour les
modèles en temps discret, (Caswell, 2001 ; Demetrius, 1969 ; Goodman, 1971 ;
Caswell, 1978) présentent des formules similaires.
Coefficients indépendants de x.
Avec\(\,\mu(t,x)=\mu(t)\) et \(\beta(t,x)=\beta(t)\,\), on peut montrer, comme
dans (Bacaër et Guernaoui, 2006, §5) pour r et \(u(t,x)\), que les solutions de
(4), (5)-(6) et (7)-(8) sont \[ r=\frac{1}{T} \int_0^T\!\! (\beta(t)-\mu(t))\,
\mathrm{d}t\ ,\] \[ u(t,x)=\frac{\beta(t-x)\ e^{-\int_{t-x}^t \beta(\tau)\,
\mathrm{d}\tau}\ \psi(t)}{\frac{1}{T} \int_0^T\! \psi(\tau)\, \mathrm{d}\tau}\
,\quad v(t,x)=\frac{\frac{1}{T} \int_0^T\!\! \psi(\tau)\,
\mathrm{d}\tau}{\psi(t)}\ , \] avec \(\psi(t)=e^{-rt+\int_0^t
(\beta(\tau)-\mu(\tau))\, \mathrm{d}\tau}\). Noter que la valeur
reproductive \(v(t,x)\) est indépendante de x. Avec
\(\mu(t)=\mu_0(t)+\varepsilon \mu_1(t)\) ou \(\beta(t)=\beta_0(t)+\varepsilon'\,
\beta_1(t)\,\), alors (10) et (11) deviennent \[\rho=-\frac{1}{T} \int_0^T\!\!
\mu_1(t)\, \mathrm{d}t\ ,\quad \rho'=\frac{1}{T} \int_0^T\!\! \beta_1(t)\,
\mathrm{d}t\ ,\] comme il se doit avec l'expression de r.
2.4 Le taux de croissance pour une petite perturbation périodique du cas autonome
Considérons maintenant le cas d'une petite perturbation périodique d'une
situation autonome de la forme \begin{equation}\tag{14} \mu(t,x)=\mu_0(x)\,
,\quad \beta(t,x)=(1+\varepsilon \cos \omega t) \beta_0(x)\, \end{equation}
avec \(|\varepsilon|\leq 1\). La sinusoïde est le facteur périodique le plus
utilisé dans la littérature. Dans ce cas, l'équation (3) prend la forme
\begin{equation}\tag{15} \Phi(t,x)=(1+\varepsilon \cos \omega t) \phi(x)\, ,
\end{equation} avec \(\phi(x)=\ell_0(x)\, \beta_0(x)\). Les
fonctions \(u_0(t,x)\) et \(v_0(t,x)\) sont toujours indépendantes de t et
données par (13). Parce que la moyenne temporelle de \(\beta_1(t,x)=\cos(\omega
t) \beta_0(x)\) est 0, l'équation (11) donne \(\rho'=0\). Donc
\(r_\varepsilon=r_0+o(\varepsilon)\). À cause de cela, on doit étudier le terme
quadratique pour voir comment la résonance du taux de croissance peut se
produire.
Il faut insister sur le fait que pas toutes les situations intéressantes sont
de la forme (14). Par exemple, si l'on étudie l'influence d'un petit changement
climatique sur une maladie à vecteurs, alors
\(\mu_0(t,x)\) et \(\beta_0(t,x)\) seront des fonctions périodiques du temps à
cause de la saisonnalité de la population de vecteurs. Dans un pareil cas, le
changement du premier ordre dans le taux de croissance donné par l'équation (11)
sera vraisemblablement différent de zéro.
Dans le reste de cet article (sauf dans les deux appendices), on se
focalisera sur les modèles linéarisés qui s'écrivent sous la forme d'une équation
de renouvellement (1) avec un noyau \(\Phi(t,x)\) de la forme (15), même si
certains de ces modèles ne peuvent s'écrire sous la forme de l'équation aux
dérivées partielles (2).
3. Formule du second ordre et résonance
(Bacaër et Ouifki, 2007) a développé une méthode numérique spéciale pour
calculer le taux de croissance \(r_\varepsilon\) lorsque le
noyau \(\Phi(t,x)\) est de la forme (15). Noter cependant que les méthodes de
(Bacaër, 2007 ; Bacaër et Ouifki, 2007) pouvaient gérer un facteur périodique
arbitraire, en particulier le cas d'une fonction périodique en escalier. C'est
plus réaliste non seulement pour la différence annuelle entre la période scolaire
et les vacances, mais aussi pour la différence hebdomadaire entre les jours de la
semaine et les week-ends.
On dira de manière peu précise qu'il y a « résonance »
si \(r_\varepsilon\) est significativement plus grand que \(r_0\) si
\(\varepsilon\neq 0\) pour certaines valeurs spéciales de la pulsation w,
c'est-à-dire si certaines fréquences spéciales favorisent la croissance. Les
questions sont alors: la résonance peut-elle se produire et si oui, pour quelles
valeurs des paramètres?
La première méthode, et la plus évidente, pour répondre à ces questions est
de calculer \(r_\varepsilon\) numériquement et de le comparer avec \(r_0\).
(Bacaër et Ouifki, 2007) a montré que le taux de
croissance \(r_\varepsilon\) défini par (4) et (15) est la racine réelle la plus
grande de l'équation suivante, qui fait intervenir une fraction continue,
\begin{equation}\tag{16} 1/\widehat{\phi}_0(r)-1=2\, \mathrm{Re}\
\cfrac{\varepsilon^2/4}{1/\widehat{\phi}_1(r)-1-\cfrac{\varepsilon^2/4}{1/\wideha
t{\phi}_2(r)-1-\cfrac{\varepsilon^4/4}{\cdots}}}\ . \end{equation}
\(\mathrm{Re}\) désigne la partie réelle. Par définition \begin{equation}\tag{17}
\widehat{\phi}_n(r)=\int_0^\infty \phi(x)\, e^{-r\, x-n\mathrm{i}\omega x}\,
\mathrm{d}x \end{equation} est la transformée de Laplace de \(\phi(x)\) calculée
en \(z=r+n\mathrm{i}\omega\). Noter que lorsque \(\varepsilon=0\), (16) se
réduit à \(\widehat{\phi}_0(r)=1\,\). C'est l'équation d'Euler-Lotka (12).
Il y a une deuxième méthode pour détecter la résonance. (Coale, 1972 ; Bacaër
et Ouifki, 2007) ont obtenu une formule approchée du second ordre
pour \(r_\varepsilon\) défini par (4) et (15) lorsque \(\varepsilon\) est petit:
\begin{equation}\tag{18} r_\varepsilon = r_0 + \alpha\, \varepsilon^2 +
o(\varepsilon^2) \quad ,\quad \alpha= -\frac{1}{2\, \widehat{\phi}'_0(r_0)}\,
\mathrm{Re} \Big (\frac{1}{1/\widehat{\phi}_1(r_0)-1}\Bigr )\, . \end{equation}
De cette manière, on voit que la résonance se produit si \(\alpha > 0\) et
si \(\alpha\) n'est pas très petit comparé à \(r_0\). On peut facilement vérifier
ces conditions numériquement. Pour les modèles avec un temps discret, Tuljapurkar
(1985) a étudié la résonance de l'amplitude des oscillations de la population.
Mais il n'a pas étudié la résonance pour le taux de croissance, après cependant
avoir remarqué que \(r_\varepsilon=r_0+O(\varepsilon^2)\).
Il y a enfin une troisième méthode, peut-être la plus intéressante, pour
détecter la résonance. Elle s'inspire des idées de (Tuljapurkar, 1985 et 1990)
pour les modèles en temps discret mais aussi de l'abondante littérature
mentionnée dans l'introduction sur la résonance près d'un équilibre endémique
dans les modèles avec un temps continu. On s'attend à ce que la résonance se
produise lorsque l'équation d' Euler-Lotka (12) a une paire de racines complexes
conjuguées \(r=x\pm \mathrm{i} y\) avec y proche de w et x proche du paramètre
malthusien \(r_0\). En effet, si \(r=\xi+\mathrm{i} \omega\) est une racine
exacte de (12), \[\widehat{\phi}_1(\xi)=\int_0^\infty \phi(x)\, e^{-\xi\, x
-\mathrm{i} \omega x}\, \mathrm{d}x=1\, .\] Si la partie réelle c est proche
de \(r_0\,\), plus précisément si \((r_0-\xi)/\omega\) est petit, on a très
approximativement \[\widehat{\phi}_1(r_0)\simeq \widehat{\phi}_1(\xi)+(r_0-\xi)
\widehat{\phi}_1'(\xi) = 1+(r_0-\xi) \widehat{\phi}_1'(\xi)\, .\] Remplaçons
cette approximation dans la formule (18) pour a et considerons à nouveau
que \(r_0-\xi\) est petit. On obtient \begin{equation}\tag{19} \alpha \simeq
\frac{1}{2\, \widehat{\phi}_0'(r_0)\, (r_0-\xi)}\, \mathrm{Re} \Bigl
(\frac{1}{\widehat{\phi}_1'(\xi)}\Bigr ) \, . \end{equation} Pour toute racine
\(r=\xi+\mathrm{i} \omega\) de (12), on a \(\xi < r_0\). Noter aussi que
\[\widehat{\phi}_0'(r_0)=-\int_0^\infty x\, \phi(x)\, e^{-r_0 x}\, \mathrm{d}x <
0\, .\] Par ailleurs, pour tout nombre complexe \(z=x+\mathrm{i} y\), on
a \(\mathrm{Re}(1/z)=x/(x^2+y^2)\). Le signe de \(\mathrm{Re}(1/z)\) est le même
que le signe de \(\mathrm{Re}(z)\). Donc pour (19), il suffit de déterminer le
signe de \(\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(\xi))\). Le dénominateur \(r_0-\xi\) est
petit. \(\alpha\) est positif si \[\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(\xi)) < 0.\]
Autrement dit, \(r_\varepsilon\) sera significativement plus grand que \(r_0\) :
il y a résonance. Le degré de résonance se mesure d'une certaine manière par la
distance \(r_0-\xi\). Plus elle est petite, plus la résonance est importante.
Rappelons aussi que \(r_0-\xi\) est lié à la vitesse avec laquelle la population
converge vers sa forme stable (au sens de Lotka, avec la durée d'infection x qui
remplace l'âge). Dans les modèles épidémiques, cette notion n'est pas très
importante car les termes non linéaires dominent rapidement la dynamique.
On n'a pas réussi à démontrer que la
condition \(\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(\xi)) < 0\) résultait de nos
hypothèses. Donc pour le moment, elle doit être considérée comme une condition
technique supplémentaire pour que la résonance se produise.
Pour cette troisième méthode, un point important est que l'équation
d'Euler-Lotka peut ne pas avoir de racine complexe autre que la racine réelle,
comme (Feller, 1941) l'a remarqué. C'est ce qui distingue les modèles où la
résonance peut se produire et ceux où elle ne se produit pas. Bien qu'il soit
possible de calculer le temps de génération moyen dans chaque modèle, cela ne
veut pas dire qu'il y a toujours une racine complexe de l'équation d'Euler-Lotka
avec une partie imaginaire proche de ce temps de génération. C'est ce que Lotka
(1939a, p. 76-77) laissait croire.
Dans la prochaine section, on va étudier ces trois méthodes pour plusieurs
modèles épidémiques simples avec un taux de contact périodique, pour montrer
comment des modèles a priori peu différents peuvent avoir des propriétés bien
différentes en ce qui concerne la résonance du taux de croissance initial.
4. Exemples
4.1 Le modèle SIR périodique
On définit
* \(S(t)\) la proportion de personnes saines (non infectées),
* \(I(t)\) la proportion de personnes infectées et infectieuses,
* \(R(t)\) la proportion de personnes ayant guéri.
Considérons le modèle \[S'(t)= - a(t)\, S\, I \, ,\quad I'(t)=a(t)\, S\, I - b\,
I\, ,\quad R'(t)=b\, I\, , \] avec \(S+I+R=1\), \(a(t)=\bar{a} (1+\varepsilon
\cos \omega t)\) et \(|\varepsilon|\leq 1\). Le paramètre \(a(t)\) est le taux de
transmission, qui est de période \(T=2\pi/\omega\). Le paramètre b est le taux de
guérison. Dietz (1974 et 1976), Grossman et coll. (1977), Grossman (1980), Smith
(1983a,1983b), Kuznetsov et Piccardi (1994), Keeling et Grenfell (2002), Greenman
et coll. (2004), et Moneim (2007a) ont étudié ce modèle avec en plus des
naissances et des morts. Dushoff et coll. (2004) ont tenu compte des personnes
guéries qui redeviennent saines après un certain temps. Greenman et Norman (2007)
ont tenu compte des deux possibilités. Contrairement aux travaux sur la résonance
pour les maladies endémiques, l'addition de naissances et de morts ou le retour
dans le compartiment sain ne sont pas importants pour le seuil épidémique. On a
omis ces termes (dans ce modèle et aussi dans les autres modèles ci-dessous) pour
garder la discussion aussi simple que possible.
L'état d'équilibre sans maladie est \((S,I,R)=(1,0,0)\). On linéarise le
système près de cet état d'équilibre et l'on pose \(J(t)=a(t)\, I(t)\). C'est le
nombre de nouvelles infections par unité de temps dans cette approximation.
\(J(t)\) est solution d'une équation de la forme (1) avec (15). En utilisant
(12), (17) et (18), on trouve facilement que \[\phi(x)=\bar{a}\, e^{-b\, x}\,
,\quad \widehat{\phi}_n(r)=\bar{a}/(b+r+n \mathrm{i} \omega)\, ,\quad r_0=\bar{a}
- b\, ,\quad \alpha=0\, .\]
La première méthode pour détecter la résonance consiste à
calculer \(r_\varepsilon\) numériquement. Pour le présent modèle, (Bacaër et
Ouifki, 2007) a déjà remarqué que \(r=\bar{a} - b=r_0\) est une racine de (16)
pour tout \(|\varepsilon|\leq 1\), mais a priori peut-être pas la plus grande.
Donc on peut suspecter que \(r_\varepsilon=r_0\). Et en effet, une autre méthode,
partant de la définition (4) de \(r_\varepsilon\), montre
que \(r_\varepsilon=r_0\) (Bacaër et Guernaoui, 2006, §5). Il n'y a pas de
résonance, quelles que soient les valeurs des paramètres.
La seconde méthode se focalise sur \(\alpha\). Ici a est nul, ce qui tend à
confirmer qu'il n'y a pas de résonance. Quant à la troisième méthode, on note
que \(r_0\) est la seule racine dans tout le plan complexe de l'équation
d'Euler-Lotka (12). Donc il n'y a pas de résonance. Tout ceci est trivial car on
arrive aux mêmes conclusions en calculant analytiquement la solution de
l'équation différentielle linéarisée. C'est ce qui est fait d'habitude dans la
littérature. Cependant il est tout de même intéressant de voir comment la méthode
générale marche sur un exemple trivial.
L'indépendance de \(r_\varepsilon\) par rapport à \(\varepsilon\) dans ce
modèle fait penser à l'idée que la distribution de probabilité
\(\phi(x)/\int_0^\infty \phi(x)\, \mathrm{d}x=b\, e^{-bx}\) est, parmi les
distributions de probabilité sur la demi-droite \([0,\infty)\) avec la même
moyenne \(1/b\), celle d'entropie maximale et donc la plus « résistante aux
perturbations environnementales », représentées ici par le facteur périodique
(Demetrius, 1977). Demetrius (1977) insiste sur le lien entre l'entropie et les
racines complexes de l'équation d'Euler-Lotka.
4.2 Le modèle SIR périodique avec une période d'infection fixe
Considérons le modèle \begin{align*} S'(t)&= - a(t)\, S(t)\, I(t) \, ,\quad
I'(t)\, =\, a(t)\, S(t)\, I(t) - a(t-\tau)\, S(t-\tau)\, I(t-\tau)\, ,\\ R'(t)&=
a(t-\tau)\, S(t-\tau)\, I(t-\tau)\, , \end{align*}
avec \(S+I+R=1\) et \(a(t)=\bar{a} (1+\varepsilon \cos \omega t)\). Le paramètre
t est la durée de la période infectieuse. Grossman (1980), Keeling et Grenfell
(2002) ont étudié ce modèle avec des naissances et des morts. Cooke et Kaplan
(1976), Smith (1977) et Nussbaum (1977,1978) l'ont étudié avec des personnes
infectées qui retournent directement dans le compartiment sain. Cette dernière
variante ne change pas le seuil épidémique.
L'état d'équilibre sans maladie est \((S,I,R)=(1,0,0)\). Le nombre de
nouvelles infections par unité de temps dans le modèle linéarisé, \(J(t)=a(t)\,
I(t)\,\), est solution d'une équation de la forme (1) avec (15). Ici
\begin{equation}\tag{20} \phi(x)=\left \{\begin{array}{lll} \bar{a} & &\forall x
< \tau,\\ 0 & & \forall x > \tau, \end{array}\right.\quad \quad \quad
\widehat{\phi}_n(r)=\left\{\begin{array}{ll} \bar{a}\, \tau & \quad
(r+n\mathrm{i}\omega=0)\\ \bar{a}\ \frac{1-e^{-r \tau -n \mathrm{i}\omega
\tau}}{r+n \mathrm{i}\omega} & \quad (r+n\mathrm{i}\omega \neq 0)
\end{array}\right.\, ,\quad \quad 1=\bar{a}\ \frac{1-e^{-r_0 \tau}}{r_0}\, .
\end{equation} \(r_0\) est une fonction implicite de \(\tau\)
\begin{equation}\tag{21} \tau=-\frac{1}{r_0} \log \Bigl
(1-\frac{r_0}{\bar{a}}\Bigr )\, . \end{equation} De plus
* \(r_0\to -\infty\) si \(\tau\to 0\)
* le signe de \(r_0\) change si \(\tau=1/\bar{a}\)
* \(r_0 \to \bar{a}\) si \(\tau\to+\infty\).
On peut facilement le démontrer avec (20) et (21). La formule (18) pour a ne peut
pas vraiment être simplifiée. On suppose \(T=2\pi/\omega=1\). C'est juste une
question de choix de l'unité de temps. Comme exemple, considérons comme dans
(Cooke et Kaplan, 1976 ; Smith, 1977 ; Nussbaum, 1977 et 1978) le cas
où \(\bar{a}=1\) par unité de temps.
Avec la première méthode, la figure 1a montre comment le taux de croissance
dépend de la période infectieuse t. On a pris \(0 < \tau < \mbox{2,5}\) et
diverses valeurs de \(\varepsilon\). Un zoom sur la figure montrerait
que \(r_\varepsilon > r_0\) si \(\varepsilon\neq 0\) et \(1 < \tau <
\mbox{1,43}\) ou alors \(2 < \tau < \mbox{2,44}\) (approximativement). Néanmoins
la différence n'est pas significative. Il n'y a qu'une faible résonance.
[2008JMBFig1a.png] [2008JMBFig1b.png] Figure 1. Résonance faible dans le modèle
SIR périodique avec une période infectieuse fixe. (a) Taux de
croissance \(r_\varepsilon\) en fonction de la période infectieuse \(\tau\) pour
diverses valeurs de \(\varepsilon\). (b) \(\alpha\) en fonction de \(\tau\).
Avec la deuxième méthode, la figure 1b montre comment a dépend de la période
infectieuse t dans la même plage de valeurs. Numériquement, on a \(\alpha >
0\) si \(1 < \tau < \mbox{1,43}\) ou bien \(2 < \tau < \mbox{2,44}\), comme il se
doit. Le maximum de \(\alpha/r_0\), qui est atteint lorsque \(\tau\simeq
\mbox{1,174}\,\), est d'environ 9,4%. Cela confirme la faiblesse de la résonance.
Avec la troisième méthode, rappelons tout d'abord qu'il y a toujours une
unique racine \(r_0\in \mathbb{R}\) de l'équation d'Euler-Lotka (20). Mais cette
équation a aussi une infinité de paires de racines complexes conjuguées. C'est le
cas plus généralement pour les modèles où \(\phi(x)\) a un support compact. Voir
par exemple (Lopez, 1961, p. 15) ou (Gyllenberg, 1985, p. 323-324). Parmi ces
racines complexes, certaines peuvent avoir une partie imaginaire égale à w pour
certaines valeurs particulières de t. Pour trouver ces valeurs, noter que la
dernière équation de (20), avec \(r=x+\mathrm{i} y\) à la place de \(r_0\),
équivaut (si l'on exclut \(x=y=0\)) au système réel \[x=\bar{a} (1-e^{-x\tau}
\cos(y\tau) )\ ,\quad y=\bar{a}\, e^{-x\tau}\, \sin(y\tau)\, .\] On
prend \(y=\omega\) et on élimine x de la deuxième équation. On obtient une seule
équation pour t : \begin{equation}\tag{22} \frac{1}{\omega \tau} \log \Bigl
[\frac{\omega}{\bar{a} \sin(\omega \tau)}\Bigr ] - \frac{1}{\tan(\omega\tau)} +
\frac{\bar{a}}{\omega}=0\, . \end{equation} Le côté gauche
* est une fonction continue de t pour \(nT < \tau < (n+1/2)T\) et tout
entier \(n\geq 1\)
* converge vers \(-\infty\) si \(\tau\to nT^+\)
* converge vers \(+\infty\) si \(\tau\to (n+1/2)T^-\).
Donc (22) a une infinité de solutions positives \(\tau_1 < \tau_2 < \cdots\).
Pour notre exemple où \(\omega=2\pi\) et \(\bar{a}=1\), on
obtient: \(\tau_1\simeq \mbox{1,187}\), \(\tau_2\simeq
\mbox{2,204}\), \(\tau_3\simeq \mbox{3,211}\ldots\)
Avec \(\tau=\tau_1\,\), les racines complexes conjuguées de (20) avec la
partie réelle la plus grande sont \(x_1\pm \mathrm{i} \omega\) avec \(x_1\simeq
-\mbox{1,615}\,\), tandis que \(r_0\simeq \mbox{0,303}\). Donc bien que \(\
\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(x_1))\simeq -\mbox{1,19} < 0\) , la différence
entre \(x_1\) et \(r_0\) est trop grande pour qu'une résonance significative se
produise: \((r_0-x_1)/\omega \simeq \mbox{0,30}\). De même lorsque \(
\tau=\tau_2\, \), les racines complexes conjuguées de (20) avec la seconde partie
réelle la plus grande sont \(x_2\pm \mathrm{i} \omega\) avec \(x_2\simeq
-\mbox{0,853}\,\), tandis que \(r_0\simeq \mbox{0,845}\). Donc bien que \(\
\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(x_2))\simeq -\mbox{2,23} < 0\,\), la différence
entre \(x_2\) et \(r_0\) est à nouveau trop grande pour qu'une résonance
significative se produise: \((r_0-x_2)/\omega \simeq \mbox{0,27}\). La même
conclusion vaut pour les autres racines complexes avec une partie imaginaire
égale à w pour \(\tau=\tau_n\).
4.3 Un modèle SEIR périodique
Supposons maintenant qu'il y ait une proportion \(E(t)\) de la population qui
soit infectée mais pas encore infectieuse, c'est-à-dire qui soit dans la phase
latente. Considérons le modèle \[ S'(t)=- a(t)\, S\, I\, ,\quad E'(t)=a(t)\, S\,
I -c\, E,\quad I'(t)=c\, E - b\, I\, ,\quad R'(t)=b\, I\, , \]
avec \(S+E+I+R=1\) et \(a(t)=\bar{a} (1+\varepsilon \cos \omega t)\). Le nouveau
paramètre c est le taux auquel les personnes infectées deviennent infectieuses.
(Dietz, 1976 ; Schwartz et Smith, 1983 ; Aron et Schwartz, 1984 ; Schwartz, 1985
; Rand et Wilson, 1991 ; Grenfell, 1992 ; Bolker et Grenfell, 1993 ; Kuznetsov et
Piccardi, 1994 ; Grenfell et coll., 1995 ; Keeling et Grenfell, 2002 ; Billings
et Schwartz, 2002 ; Altizer et coll., 2006 ; Moneim, 2007a et 2007b) ont étudié
ce modèle avec en plus des naissances et des morts, (Ma et Ma, 2006) avec les
personnes guéries qui retournent dans le compartiment sains, et (Greenman et
Norman, 2007) avec les deux. Ce modèle converge vers le modèle SIR de la section
4.1 si \(c\to +\infty\,\).
L'état d'équilibre sans maladie est \((S,E,I,R)=(1,0,0,0)\). Le nombre de
nouvelles infections par unité de temps dans le modèle linéarisé, \(J(t)=a(t)\,
I(t)\,\), est solution d'une équation de la forme (1) avec (15). Ici,
\[\phi(x)=\bar{a}\, c \ \frac{e^{-c\, x}-e^{-b\, x}}{b-c}\, ,\quad
\widehat{\phi}_n(r)=\frac{\bar{a}\, c}{(r+c+n\mathrm{i}\omega)
(r+b+n\mathrm{i}\omega)}\, , \] \begin{equation}\tag{23}
r_0=\frac{-(b+c)+\sqrt{(b-c)^2+4\bar{a}c}}{2}\, ,\quad \alpha= \frac{-(\bar{a}\,
c)^2}{\sqrt{(b-c)^2+4\bar{a}c}\ [\omega^2+(b-c)^2+4\bar{a}\, c]}\, .
\end{equation}
Pour la première méthode, considérons par exemple le cas
où \(T=2\pi/\omega=1\) semaine, qui modélise des différences de taux de contact
entre les jours de la semaine et les week-ends, et où la période infectieuse
moyenne \(1/b\) est égale à 2 jours, soit 2/7 semaine. Prenons un taux de
contact moyen \(\bar{a}=\mbox{1,2}\, b\), ce qui donne une
reproductivité \(\bar{a}/b=\mbox{1,2}\) si \(\varepsilon=0\). C'est une hypothèse
raisonnable si l'on considère une maladie émergente. La figure 2 montre comment
le taux de croissance dépend de la période de latence moyenne pour diverses
valeurs de \(\varepsilon\). Noter que \(r_\varepsilon\) est toujours plus petit
que \(r_0\) si \(\varepsilon\neq 0\). Il n'y a pas de résonance.
[2008JMBFig2.png] Figure 2. Absence de résonance dans le modèle SEIR périodique.
Le taux de croissance en fonction de la moyenne de la période de latence pour
différentes valeurs de \(\varepsilon\).
Pour la deuxième méthode, on remarque que \(\alpha < 0\) : il n'y a pas de
résonance. Quant à la troisième méthode, l'équation d'Euler-Lotka (12) pour ce
modèle n'a qu'une seule racine, à savoir \(r_0\,\), dans la partie du plan
complexe où converge l'intégrale du côté droit de (12): \(\mathrm{Re}(r) >
\max\{-b,-c\}\). Noter que \(r_0\) est solution d'une équation pôlynomiale de
degré 2. L'autre solution, donnée par (23) avec un signe moins devant la racine
carrée, est une racine de l'équation déduite de (12) par continuation analytique
de l'intégrale (Feller, 1941). Pour cette seconde solution, l'intégrale diverge.
De toute façon, cette solution est réelle; il n'y a pas de résonance.
4.4 Le modèle SEIR périodique avec une période de latence fixe
Le modèle est donné par \begin{align*} S'(t)&= - a(t)\, S(t)\, I(t) \, ,\quad
E'(t)\, =\, a(t)\, S(t)\, I(t) - a(t-\tau)\, S(t-\tau)\, I(t-\tau)\, ,\\
I'(t)&=a(t-\tau)\, S(t-\tau)\, I(t-\tau) - b\, I(t)\, ,\quad R'(t)\, =\, b\,
I(t)\, , \end{align*} avec \(S+E+I+R=1\) et \(a(t)=\bar{a} (1+\varepsilon \cos
\omega t)\). Il figure implicitement dans (Williams et Dye, 1997) et sous une
forme légèrement différente dans (Bacaër et Ouifki, 2007). Le paramètre t est
maintenant la durée de la période de latence. Le modèle converge vers celui de la
section 4.1 si \(\tau\to 0\).
L'état d'équilibre sans maladie est \((S,E,I,R)=(1,0,0,0)\). Le nombre de
nouvelles infections par unité de temps dans le modèle linéarisé, \(J(t)=a(t)\,
I(t)\,\), est solution d'une équation de la forme (1) avec (15). Ici
\begin{equation}\tag{24} \phi(x)=\left\{\begin{array}{lll} 0 & & \forall x <
\tau,\\ \bar{a}\, e^{-b(x-\tau)} & & \forall x > \tau, \end{array}\right. \quad
\quad \widehat{\phi}_n(r)= \bar{a}\, \frac{e^{-n\mathrm{i} \omega \tau -
r\tau}}{r+b+n\mathrm{i} \omega}\, ,\quad \quad r_0 = \bar{a} \, e^{-r_0 \tau} -
b\, . \end{equation} Noter à nouveau que la formule pour \(r_0\) n'est pas
explicite. La formule (18) pour a ne peut être vraiment simplifiée.
Pour la première méthode, on a choisi comme dans la section
précédente \(T=2\pi/\omega=1\) semaine, \(1/b=2\) jours ou 2/7 semaine,
et \(\bar{a}=\mbox{1,2}\, b\). La figure 3a montre comment le taux de croissance
dépend de la période de latence pour diverses valeurs de e. Remarquer dans la
figure 3a que la résonance se produit approximativement si \(\mbox{0,66} < \tau <
1\) ou bien \(\mbox{1,66} < \tau < 2\). Il y a aussi résonance pour des valeurs
plus grandes de t, que l'on ne montre pas. (Bacaër et Ouifki, 2007) a obtenu un
résultat semblable pour un modèle légèrement différent (SEIS et non SEIR); mais
aucune explication pour les bosses n'avait été donnée. Noter que lorsque
\(\varepsilon=1\), le taux de croissance \(r_\varepsilon\) peut devenir négatif
dans une certaine plage de valeurs de la période de latence. La moyennisation du
taux de contact (ce qui équivaut à prendre \(\varepsilon=0\)) prédirait une
croissance épidémique alors qu'en fait aucune épidémie ne peut envahir la
population.
[2008JMBFig3a.png] [2008JMBFig3b.png] Figure 3. Résonance dans le modèle SEIR
périodique avec une période de latence fixe. (a) Le taux d'accroissement en
fonction de la période de latence t pour différentes valeurs de e. (b) a en
fonction de t.
Avec la deuxième méthode, on peut vérifier numériquement que \(\alpha >
0\) au moins pour \(\mbox{0,66} < \tau < 1\) et \(\mbox{1,66} < \tau <
2\) (Figure 3b). Avec la troisième méthode, la question est de savoir si
l'équation d'Euler-Lotka du côté droit de (24) peut avoir des solutions r avec
une partie imaginaire y égale à w. Avec \(r=x+\mathrm{i} y\,\), l'équation pour r
peut s'écrire comme un système réel pour x et y : \[x = \bar{a} \, e^{-x \tau}
\cos(y \tau) - b\, ,\quad y = - \bar{a} \, e^{-x \tau} \sin(y \tau) \, . \]
Avec \(y= \omega\,\), on élimine x de la seconde équation. On obtient
\begin{equation}\tag{25} \frac{1}{\omega \tau} \log \Bigl [-
\frac{\omega}{\bar{a}\, \sin(\omega \tau)} \Bigr ] - \frac{1}{\tan(\omega\tau)}
-\frac{b}{\omega}=0\, . \end{equation} Comme dans la section 4.2, le côté gauche
est une fonction continue de t pour tout \((n-1/2)T < \tau < n T\) et tout
entier \(n\geq 1\), qui converge vers -infty si \(\tau\to (n-1/2)T^+\,\), et qui
converge vers +infty si \(\tau\to nT^-\). Donc (25) a une infinité de
solutions \(\tau_{1} < \tau_{2} < \cdots\) qui convergent vers +infty, pour
lesquelles on peut s'attendre à de la résonance. Résolvons (25) numériquement
avec les mêmes valeurs des paramètres que ci-dessus. On obtient: \(\tau_{1}\simeq
\mbox{0,819}\), \(\tau_{2}\simeq \mbox{1,825}\), \(\tau_3\simeq
\mbox{2,827}\ldots\)
Avec \(\tau=\tau_1\,\), les racines complexes conjuguées de (24) avec la
partie réelle la plus grande sont \(x_1\pm \mathrm{i} \omega\) avec \(x_1\simeq
-\mbox{0,609}\,\), tandis que \(r_0\simeq \mbox{0,166}\). On a \(\
\mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(x_1))\simeq -\mbox{0,88} < 0\). La différence
entre \(x_1\) et \(r_0\) est assez petite: \((r_0-x_1)/\omega\simeq
\mbox{0,12}\). Donc il y a résonance si \(\tau\simeq \tau_1\).
Avec \(\tau=\tau_2\,\), les racines complexes de (24), avec la partie réelle qui
arrive en second par ordre décroissant, sont \(x_2\pm \mathrm{i} \omega\) avec
\(x_2\simeq -\mbox{0,284}\,\), tandis que \(r_0\simeq \mbox{0,086}\). À
nouveau, \(\ \mathrm{Re}(\widehat{\phi}_1'(x_2))\simeq -\mbox{1,89} < 0\). La
différence entre \(x_2\) et \(r_0\) est petite: \((r_0-x_2)/\omega\simeq
\mbox{0,06}\). Il y a résonance lorsque \(\tau\simeq \tau_2\). Il y a aussi
résonance lorsque \(\tau=\tau_n\) et \(n > 2\).
D'un point de vue pratique, il n'est pas impossible qu'une maladie ait une
période de latence proche de \(\tau_{1}\) (ici, environ 5,7 jours) suivie en
moyenne de deux jours de période infectieuse. Un taux de contact avec une
périodicité d'une semaine (due à la différence entre les jours de la semaine et
les week-ends) peut provoquer une forte résonance pour une telle maladie. Noter
ici que le temps entre deux générations (\(\int_0^\infty x\, \phi(x)\,
\mathrm{d}x/\int_0^\infty \phi(x)\, \mathrm{d}x=\tau_1+1/b\simeq
\mbox{7,7}\) jours) est proche de la périodicité du taux de
contact, \(T=7\) jours . Mais cette règle approchée pour la résonance ne
fonctionnait pas pour le modèle de la section précédente. La différence entre la
figure 2 et la figure 3a est un peu surprenante. Il s'agit de modèles SEIR, le
premier avec une période de latence distribuée exponentiellement, le second avec
une période de latence fixe. La conclusion biologique, savoir si la maladie va
s'intaller ou pas, semble très dépendant du choix entre ces deux modèles a priori
similaires. Des modèles avec de petites différences peuvent donc se comporter
très différemment quant à la résonance du taux de croissance initial.
Les modèles SEIR où la période de latence et la période infectieuse sont
fixes, tels que ceux avec en plus des naissances et des morts (Grossman, 1980 ;
Keeling et Grenfell, 2002), présentent une résonance similaire du taux de
croissance initial. Il est encore possible de trouver des valeurs des paramètres
pour lesquelles il y a une racine complexe de l'équation d'Euler-Lotka avec une
partie imaginaire y égale à w. Mais l'astuce qui consiste à éliminer la partie
réelle x pour obtenir une seule équation comme dans (25) ne fonctionne plus.
4.5 Le modèle SEIR périodique avec une période de latence qui suit la loi Gamma
Pour comprendre pourquoi les modèles des deux dernières sections donnent des
résultats si différents, considérons le cas d'une période de latence qui suit la
loi Gamma. C'est une généralisation à la fois de la distribution exponentielle et
de la distribution de Dirac lorsque la période de latence est fixe. Plus
précisément, \[f(x)=c^\nu\, x^{\nu-1}\, e^{-c\, x} / \Gamma(\nu)\] est la
distribution de la période de latence, où \(c > 0\) et \(\nu\geq 1\) sont des
nombres réels. La période de latence moyenne est \(\tau=\nu/c\) et la variance
est \(\sigma^2=\nu/c^2\). Si n=1, on retrouve la distribution exponentielle avec
une moyenne égale à \(1/c\) de la section 4.3. La distribution Gamma converge
vers la distribution de Dirac en \(x=\tau\), comme dans la section 4.4,
si \(\nu\) et \(c\) convergent vers +infty tandis que le quotient \(\nu/c\) est
maintenu constant et égal à \(\tau\).
Le modèle est \begin{align*} S'(t)&= - a(t)\, S(t)\, I(t)\, ,\\ E(t,0)\, &=\,
a(t)\, S(t)\, I(t)\, , \quad \frac{\partial E}{\partial t}+\frac{\partial
E}{\partial x}\, =\, -\gamma(x)\, E(t,x)\, ,\\ I'(t)&=\int_0^\infty \gamma(x)\,
E(t,x)\, \mathrm{d}x - b\, I(t)\, ,\\ R'(t)\, &=\, b\, I(t)\, , \end{align*}
avec \(S(t)+\int_0^\infty E(t,x)\, \mathrm{d}x + I(t)+R(t)=1\) et \(a(t)=\bar{a}
(1+\varepsilon \cos \omega t)\). Ici, \(\gamma(x)\) est lié à \(f(x)\) par la
relation \[e^{-\int_0^x \gamma(y)\, \mathrm{d}y}=1-\int_0^x f(y)\, \mathrm{d}y,\]
c'est-à-dire \[\gamma(x)=f(x)/(1-\int_0^x f(y)\, \mathrm{d}y).\] (Dietz, 1976 ;
Keeling et Grenfell, 2002) ont étudié des variantes de ces modèles. Ici on peut
montrer que le nombre de nouvelles infections par unité de temps dans le modèle
linéarisé \(J(t)=a(t)\, I(t)\) est solution d'une équation de la forme (1) avec
(15) et \[\phi(x)=\bar{a} \int_0^\infty e^{-b(x-y)}\, f(y)\, \mathrm{d}y\, .\] On
peut aussi montrer que \[\widehat{\phi}_n(r)=\frac{\bar{a}\,
c^\nu}{(b+r+n\mathrm{i} \omega) (c+r+n\mathrm{i} \omega)^\nu}\, ,\quad r_0 =
\frac{\bar{a}\, c^\nu}{(c+r_0)^\nu}-b\, . \] Noter à nouveau que la formule
pour \(r_0\) n'est pas explicite. La formule (18) pour a ne peut être simplifiée.
La figure 4 montre le signe de \(\alpha\) (plus précisément les lignes de
niveau \(\alpha=0\)) dans le diagramme \((\tau,1/\nu)\). \(\alpha > 0\) est
une condition necessaire pour la résonance. La ligne horizontale du
haut \(\nu=1\) correspond au cas d'une période de latence distribuée
exponentiellement et se trouve dans la partie du diagramme où \(\alpha < 0\),
comme on s'y attend à la suite de la figure 2. La limite \(\sigma\to
0\) (ou \(1/\nu=\sigma^2/\tau^2\to 0\)) correspond à la période de latence fixée,
donc la ligne horizontale du bas correspond à la figure 3 et présente plusieurs
parties où \(\alpha > 0\). De cette manière, on voit comment la résonance
disparaît lorsque la variance \(\sigma^2\) croît.
[2008JMBFig4.png] Figure 4. Lignes de niveau \(\alpha=0\) dans le
diagramme \((\tau,1/\nu)\). \(\tau\) est la période de latence
moyenne. \(1/\nu=\sigma^2/\tau^2\). \(\sigma\) est la déviation standard. Les
zones où \(\alpha > 0\) sont celles où il peut y avoir résonance. Dans la partie
inférieure droite du diagramme, les zones où \(\alpha < 0\) alternent avec celles
où \(\alpha > 0\) mais on ne montre que les lignes de niveau \(\alpha=0\).
5. Mille et un modèles de population périodiques
Évidemment la liste des modèles pourrait continuer jusqu'à la nausée :
* un taux de contact périodique d'une forme différente (Earn et coll., 2000 ;
Keeling et coll., 2001 ; Keeling et Grenfell, 2002 ; Stone et coll., 2007),
* une vaccination périodique (Dietz, 1976 ; Grassly et Fraser, 2006 ; Greenman
et Norman, 2007 ; Agur et coll., 1993 ; D'Onofrio, 2002a, 2002b, 2004, 2005 ;
Moneim et Greenhalgh, 2005a et 2005b ; Gao et coll., 2006 ; Gao et coll.,
2007),
* une population périodique de vecteurs ou un réservoir périodique (Bacaër et
Guernaoui, 2006 ; Bacaër, 2007 ; Heesterbeek et Roberts, 1995a et 1995b ;
Lord et coll., 1996 ; Kerr et coll., 1997 ; Codeço, 2001 ; Lord, 2004 ;
Coutinho et coll., 2006),
* une démographie périodique (Roberts et Kao, 1998 ; Tang et Chen, 2002 ; Wolf
et coll., 2006 ; He et Earn, 2007 ; Zhang et Teng, 2007)
* une migration périodique (Zhang et Zhao, 2007)
dans chacun des mille et un modèles épidémiques de (Hethcote, 1994).
De plus, comme le mentionne l'introduction, l'équation linéaire (1) se
retrouve dans la plupart des problèmes de dynamique des populations (démographie,
écologie, épidémiologie, théorie du chémostat, immunologie, etc). C'est
l'approximation linéaire. Donc le même phénomène de résonance peut être étudié
par exemple pour
* les récoltes périodiques (Anita et coll., 1998 ; Luo et coll., 2004 ; Choisy
et Rohani, 2006),
* les pullulations périodiques de phytoplankton (Huppert et coll., 2005),
* les efforts de contrôle périodiques pour les maladies (Fuhrman et coll.,
2004; Jiao et Chen, 2006),
* les entrées et sorties périodiques d'un chémostat, voir (Wang et coll., 2008)
parmi de nombreuses autres références,
* les traitements antiviraux périodiques (D'Onofrio, 2005a ; Breban et Blower,
2006),
* les traitements anticancéreux périodiques (D'Onofrio et Gandolfi, 2004 et
2006 ; D'Onofrio, 2005b),
* les modèles périodiques de populations de cellules (Pang et Tzeng, 2008),
etc.
On s'attend à de la résonance pour certains modèles et pas pour d'autres. Noter
que la réponse dépend du modèle linéarisé près de l'état stationnaire (ou
périodique) trivial, mais pas du type de termes non linéaires utilisé. Ainsi la
plupart des modèles avec un petit nombre de compartiments se ramènent aux mêmes
calculs que ceux effectués ci-dessus.
La principale question qui demeure est de savoir si, pour certaines maladies
particulières ou pour certaines applications dans d'autres domaines de la
dynamique des populations, ce phénomène de résonance joue un rôle significatif.
Comme on a vu, c'est une question difficile puisque pour des modèles très proches
tels les modèles SEIR avec une période de latence exponentielle ou fixe, les
conclusions sont différentes même si ces deux modèles pourraient convenir pour la
même maladie. Les modèles avec \(\phi(x)\) à support compact sont cependant plus
réalistes. Dans ce cas, l'équation d'Euler-Lotka a une infinité de racines
complexes conjuguées. Donc il se peut que la résonance se produise pour certaines
valeurs des paramètres.
Appendice 1: croissance exponentielle de la valeur reproductive totale dans un
environnement périodique
La preuve suit celle pour le cas autonome. On part de (9). Puis on utilise la
première équation de (2) et on intègre par parties: \begin{align*}
\frac{\mathrm{d}V}{\mathrm{d}t} &= \int_0^\infty \Bigl [i(t,x)\, \frac{\partial
v}{\partial t}+ \frac{\partial i}{\partial t}\, v(t,x)\Bigr ]\, \mathrm{d}x \\ &=
\int_0^\infty \Bigl [i(t,x)\, \frac{\partial v}{\partial t}- \frac{\partial
i}{\partial x}\, v(t,x) - \mu(t,x)\, i(t,x)\, v(t,x)\Bigr ]\, \mathrm{d}x\\ &=
\int_0^\infty \Bigl [\frac{\partial v}{\partial t}+ \frac{\partial v}{\partial x}
- \mu(t,x)\, v(t,x)\Bigr ] i(t,x)\, \mathrm{d}x +i(t,0)\, v(t,0)\, . \end{align*}
En utilisant la seconde équation de (2) et (7), on obtient finalement
\[\frac{\mathrm{d}V}{\mathrm{d}t} = \int_0^\infty \Bigl [\frac{\partial
v}{\partial t}+ \frac{\partial v}{\partial x} - \mu(t,x)\, v(t,x)+v(t,0)\,
\beta(t,x)\Bigr ] i(t,x)\, \mathrm{d}x = r \int_0^\infty \!\!\!v(t,x)\, i(t,x)\,
\mathrm{d}x = r\, V(t)\, .\] Donc \(V(t)=V(0)\, e^{rt}\).
Remarque. Avec la définition (5) de \(u(t,x)\), \(i(t,x)=e^{rt}\,
u(t,x)\) si \(i(0,x)=u(0,x)\). La croissance exponentielle de la valeur
reproductive totale \(V(t)\) implique \[\int_0^\infty \!u(t,x)\, v(t,x)\,
\mathrm{d}x = \int_0^\infty \!u(0,x)\, v(0,x)\, \mathrm{d}x, \quad \forall t >
0.\] La normalisation (8) prend la forme \[\int_0^\infty \!u(t,x)\, v(t,x)\,
\mathrm{d}x =1,\] comme dans (Michel et coll., 2005).
Appendice 2: sur la définition d'Ediev de la valeur reproductive
Tout d'abord, noter avec (7) que la valeur reproductive est telle que
\begin{equation} v(t,x)=\int_x^\infty \!\!\!v(t+y-x,0)\, e^{-r (y-x)}\times
\frac{\ell(t-x,y)}{\ell(t-x,x)}\, \beta(t+y-x,y)\, \mathrm{d}y\, .\tag{26}
\end{equation} On définit \begin{equation}\tag{27} c(t,x)=v(t+x,x)\,
e^{-r(t+x)}\, . \end{equation} Alors (26) implique \begin{equation}\tag{28}
c(t,x)=\int_0^\infty c(t+y,0)\, \frac{\ell(t,y)}{\ell(t,x)}\, \beta(t+y,y)\,
\mathrm{d}y\, . \end{equation} Ediev (2007, équation (4)) a utilisé l'équation
(28) comme point de départ pour essayer de généraliser le théorème de Fisher sur
la croissance exponentielle de la valeur reproductive totale. Il a nommé
\(c(t,x)\) le « potentiel démographique d'un personne d'âge x née à l'instant t
». En introduisant le « potentiel démographique total » au temps t
\[C(t)=\int_0^\infty i(t,x)\, c(t-x,x)\, \mathrm{d}x\, ,\] Ediev (2007) put
montrer d'abord que \(\mathrm{d}C/\mathrm{d}t=0\), c'est-à-dire
que \(C(t)=C(0)\) est constant.
Fisher (1927) avait normalisé sa définition de la valeur reproductive de
sorte que \(v(0)=1\) dans le cas où la fertilité et la mortalité ne dépendent
pas du temps. (Ediev, 2007, équation (6)) choisit de généraliser la définition de
la valeur reproductive avec \begin{equation}\tag{29}
v^*(t,x)=\frac{c(t-x,x)}{c(t,0)}\, , \end{equation} où l'un utilise la notation
avec une étoile \(v^*\) pour distinguer cette définition de la nôtre. Noter qu'en
effet \(v^*(t,0)=1\) pour tout t.
La définition (29) pour la valeur reproductive dans le cas périodique n'a pas
de « bonnes » propriétés. La raison en est que dans toute la théorie developpée
jusqu'à présent, la valeur reproductive apparaît toujours comme une fonction
propre (ou un vecteur propre dans le cadre discret) d'un certain opérateur
linéaire. Voir par exemple (Grafen, 2006). Dans le cas autonome, la valeur
reproductive n'est une fonction que de l'âge x (appelons-la \(v(x)\)). Donc ce
n'est pas un problème de la normaliser de sorte que \(v(0)=1\). Mais avec des
fertilités et des mortalités qui dépendent du temps (par exemple de manière
périodique), la valeur reproductive est une fonction à la fois du temps t et de
l'âge x. La liberté dans la normalisation de la fonction propre signifie que l'on
n'a qu'un seul paramètre scalaire libre. Forcer \(v^*(t,0)=1\) pour tout t
implique que la fonction \(v^*(t,x)\) ne peut être une fonction propre, sauf (vu
(26)) si on a pour un certain r \begin{equation}\tag{30} 1=\int_0^\infty e^{-r
y}\, \ell(t,y)\, \beta(t+y,y)\, \mathrm{d}y, \quad \forall t \end{equation}
(Ediev, 2007, équation (7)). Mais (30) est presque sûrement faux, sauf
si \(\ell(t,x)\) et \(\beta(t,x)\) ne dépendent pas du temps. Ediev (2007) dut
supposer (30) pour montrer que la valeur reproductive totale, définie par
\[\int_0^\infty i(t,x)\, v^*(t,x)\, \mathrm{d}x,\] grandit exponentiellement au
taux r.
Si l'on veut vraiment définir la valeur reproductive à partir du potentiel
démographique, on peut utiliser (27), c'est-à-dire \begin{equation}\tag{31}
v(t,x)=c(t-x,x)\, e^{r t}\, . \end{equation} Ainsi, l'hypothèse improbable (30)
n'est plus nécessaire pour démontrer la croissance exponentielle de la valeur
reproductive totale. La définition (31) requiert bien sûr que r ait été
prédéfini: cela peut être un problème si l'on considère comme dans (Ediev, 2007)
des fertilités et des mortalités arbitraires et pas seulement périodiques. En
utilisant (31) comme définition pour la valeur reproductive, on voit facilement
que la constance de \(C(t)\) est équivalente à la croissance exponentielle de la
valeur reproductive totale \(V(t)\) définie par (9) : \(V(t) = e^{rt}
C(t)=e^{rt}\, C(0)=e^{rt}\, V(0)\).
Remerciements
Ce travail a reçu le soutien de la Fondation des sciences naturelles de
l'Université du Xinjiang et du Programme de recherches avancées de coopérations
franco-chinoises (PRA SI-05-01). Ce travail a été terminé alors que N. B.
visitait le collège de mathématiques et sciences des systèmes de l'Université du
Xinjiang à Urumqi, en Chine. On remercie M. Gyllenberg, R. M. Nisbet, R. Schoen
et S. Tuljapurkar pour avoir envoyé des copies de leurs articles, et H. Caswell
pour ses conseils.
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